Catégorie : News

  • Ambiguity-tln : Ambigüité / ambivalence (syntaxique, sémantique ou énonciative) en linguistique

    Colloque international Ambiguity-tln : Ambigüité / ambivalence (syntaxique, sémantique ou énonciative) en linguistique

    Propositions avant le 15 janvier 2025

    27-28 nov. 2025
    Université de Toulon, La Garde, France

    Site du colloque

    Appel à communication

    Appel à communications colloque de linguistique organisé à l’Université de Toulon les 27 et 28 novembre 2025.
    Avec le soutien du laboratoire Babel (EA 2649) de l’Université de Toulon et de l’Association des Linguistes Anglicistes de l’Enseignement Supérieur (ALAES).

    Call for papers for a symposium to be held at the Université de Toulon on 27th and 28th November 2025.
    With the support of the Babel laboratory (EA 2649) at the Université de Toulon and the ALAES (Association des Linguistes Anglicistes de l’Enseignement Supérieur, the ‘French society for the linguistics of English’)

    Convocatoria Congreso de lingüística organizado en la universidad de Tolón (Francia) los días 27 y 28 de noviembre de 2025.
    Con el apoyo del laboratorio Babel (EA 2649) de la Universidad de Toulon y de la Association des Linguistes Anglicistes de l’Enseignement Supérieur (ALAES).

    Scroll down for English version.
    Véase más abajo la versión en español.

    Ambigüité / ambivalence (syntaxique, sémantique ou énonciative) en linguistique

    L’ambigüité est un concept productif en linguistique, et ferait même « partie intégrante du modèle » selon A. Culioli ([1973] 1999 : 48). Ce terme, utilisé aussi dans le langage courant et la vie quotidienne, correspond à une « intuition fondamentale [selon laquelle] quelque chose de double se dissimule sous une apparence d’unicité » (Le Goffic, 1982 : 83 – 84). Si la polysémie de certains morphèmes lexicaux ou grammaticaux engendre facilement l’ambigüité (« le secrétaire est dans le bureau », exemple emprunté à Dubois et al. 1999 : 31), cette dernière peut également se situer au niveau de la proposition et, partant, de la phrase, lorsqu’un agencement de marqueurs se prête à plusieurs interprétations : l’ambigüité syntaxique se double dès lors d’une ambigüité sémantique.

    Néanmoins, la plupart du temps, le recours à un contexte plus fourni, ou bien l’examen plus approfondi d’autres marques grammaticales ou énonciatives présentes dans l’énoncé permettent de lever l’ambigüité. En effet, de tels phénomènes engagent crucialement le rapport entre les formes linguistiques et le co(n)texte, qu’il revient au linguiste d’analyser.

    Il existe toutefois des cas dans lesquels il n’est pas possible de désambigüiser, et d’opter

    avec certitude pour une catégorie plutôt qu’une autre, dans la mesure où les indices syntaxiques ne sont pas assez parlants ou donnent des résultats contradictoires, tandis que le recours au contexte n’est pas suffisant pour éliminer l’ambigüité. Or, les linguistes ont souvent été inspirés par ces phénomènes inclassables : on pense à la « théorie du reste » de Jean-Jacques Lecercle. Il peut aussi être question, en se fondant sur une métaphore biologique, d’exemples de phénomènes « hybrides » (cf. Guillaume 2014). P. Le Goffic (1982) a pour sa part recours au concept d’« ambivalence », terme à l’origine utilisé en psychanalyse pour qualifier des états psychiques contradictoires. Pour Catherine Fuchs (1995), l’ambivalence est une forme de transgression ne pouvant se produire qu’en discours, à la différence de l’ambigüité, qui serait propre à la langue. On retrouve dans « ambivalence » la même racine latine ambo signifiant « (les) deux à la fois » (CNRTL) que dans « ambigüité », mais il semble toutefois que l’on va plus loin dans la complexité, avec des phénomènes plus hétérogènes et non réductibles à une seule signification. Dérive inévitable de l’indétermination de la langue ou produit de la stratégie discursive du locuteur, des « zones troubles » (Le Goffic 1982 : 83) sont ainsi générées, qu’il incombe à l’interlocuteur de démêler. Face à un idéal de non-équivocité, l’ambivalence comme l’ambigüité peuvent ainsi représenter un danger. Le risque accru de malentendus nous invite alors à nous questionner sur la dimension éthique de l’utilisation de ces formes duplices.

    Michel Ballard (1990 :153) avance « [qu’]à première vue, […] l’ambigüité [es]t un problème qui passionne davantage les linguistes, les stylisticiens ou les philosophes que les traductologues. » Une approche traductologique de l’ambigüité et/ou de l’ambivalence n’est pourtant pas à exclure. Face à l’ambigüité, il est nécessaire pour le traducteur de faire des choix. Lorsqu’elle est intentionnelle, l’ambigüité doit être conservée. À l’inverse, les cas d’ambigüités fortuites se doivent d’être levés (Rydning 1998). Par ailleurs, en traduction automatique, les outils actuels, de plus en plus performants, réussissent généralement à éviter les cas d’ambigüité. Cependant, l’étape de relecture et de post-édition reste le plus souvent indispensable.

    Sans exclure des approches essentiellement théoriques, ce colloque entend soumettre les concepts d’ambivalence et d’ambigüité à l’épreuve des corpus afin d’en évaluer la portée et les limites en contexte. Par conséquent, il s’agira d’appréhender les cas de dualité interprétative au sein de corpus d’étude variés, oraux ou écrits. Ceux-ci pourront être de nature diverse – publicité, littérature, discours politique, presse, communication médiée par ordinateur, données lexicographiques, etc. –, permettant ainsi une exploration étendue et transversale de ces phénomènes. Les langues à privilégier seront le français, l’anglais et l’espagnol, mais d’autres langues et d’autres familles de langues que celles-ci peuvent également être convoquées.

    Les propositions pourront s’articuler, de manière indicative et non limitative, autour des divers axes évoqués dans cet appel, notamment :

    • définitions et effets de l’ambigüité et de l’ambivalence, rôle de la polysémie et du contexte ; dans quels cas les relations entre valeur d’un morphème et contexte permettent- elles de définir les conditions favorables à une interprétation en termes d’ambivalence ?
    • le vague référentiel est-il nécessairement ambigu ? par exemple, en ce qui concerne les problèmes de délimitation du référent (pronom de première personne du pluriel en français – cf. Monte 2022 -, omission du pronom personnel sujet en espagnol…).
    • quels sont les effets possibles du dédoublement d’interprétations d’un même énoncé, pouvant être compatibles et finissant par s’amalgamer, ou bien se révélant incompatibles, mais dans le même temps impossibles à départager ?
    • sur le plan énonciatif, dans le champ du discours représenté, à quelles conditions les formes complexes de représentation du discours autre (Authiez-Revuz 2020) sont-elles source d’ambigüité ? L’on ne sait dans certains cas qui parle, et les attributions à deux sources énonciatives différentes sont parfois incompatibles, et parfois ambivalentes – la superposition des voix ou points de vue portés par les énoncés représentés faisant alors partie des ressources déployées par le locuteur/énonciateur premier (Germoni et Stolz 2019). Et que devient alors, dans la structure narrative globale, la répartition entre narration, dialogues et pensées ?
    • en traduction, est-il toujours possible d’évaluer le caractère intentionnel ou fortuit de l’ambigüité ? Quelle(s) incidence(s) la conservation ou non de l’ambigüité et/ou de l’ambivalence peuvent-elles avoir ? La question de cas intraduisibles ou d’échecs de traduction pourra également être étudiée.

    Modalités de soumission et calendrier :

    • proposition de communication anonyme (une à deux pages maximum, comportant le titre de la communication, un résumé, quelques références bibliographiques) à envoyer avant le 15 janvier 2025 en format Word et / ou pdf à l’adresse suivante :
      ambiguity-tln@sciencesconf.org
      Merci d’indiquer clairement le nom et l’affiliation de l’auteur ou des auteurs dans le corps du courriel.
    • réponse aux auteurs : au plus tard le 30 mars 2025
    • 27 et 28 novembre 2025 : colloque à l’Université de Toulon

    Ambiguity / ambivalence in linguistics (from a syntactic, semantic or enunciative point of view)

    Ambiguity is a productive concept in linguistics, and can even be termed « an integral part of the linguistic model » according to A. Culioli ([1973] 1999: 48; our translation). This concept, also used in everyday language and life, corresponds to a « fundamental intuition [according to which] something double is hidden beneath an appearance of unicity » (Le Goffic, 1982: 83 – 84; our translation). While the polysemy of certain lexical or grammatical morphemes easily gives rise to ambiguity (the fisherman went to the bank), ambiguity can also occur at clause level, and also at sentence level, when a combination of markers lends itself to several interpretations: syntactic ambiguity therefore paves the way for semantic ambiguity.

    Most of the time, however, ambiguity can be resolved by resorting to a more specific context, or by a closer examination of other grammatical or enunciative markers present in the utterance. Indeed, such phenomena fundamentally engage the relationship between linguistic forms and co(n)text, which the linguist needs to analyse.

    Nevertheless, there are cases in which it is not possible to disambiguate and to opt with certainty for one category rather than another, insofar as syntactic clues are not specific enough or give contradictory results, while the recourse to context is not sufficient to eliminate ambiguity. However, linguists have often been inspired by these unclassifiable phenomena: Jean-Jacques Lecercle’s « theory of the remainder » comes to mind. Based on a biological metaphor, such phenomena can also be described as examples of « hybridism » (Guillaume 2014). P. Le Goffic (1982), for his part, uses the concept of « ambivalence », a term originally used in psychoanalysis to qualify contradictory psychic states. For Catherine Fuchs (1995), ambivalence is a form of transgression that can only occur in discourse, unlike ambiguity, which is specific to language. In « ambivalence » one finds the same Latin root ambo, which means « (the) two at once » (CNRTL), as in « ambiguity », but it seems that the complexity is taken a step further with ‘ambivalence’ involving more heterogeneous phenomena that cannot be reduced to a single meaning. Whether an inevitable side effect of the indeterminacy of language or the result of the speaker’s discursive strategy, « turbid zones » (Le Goffic 1982: 83; our translation) are thus generated, which the interlocutor has to untangle. Faced with an ideal of non-equivocation, ambivalence and ambiguity may represent a danger. The increased risk of misunderstanding invites us to question the ethical dimension of using such duplicitous forms.

    Michel Ballard (1990:153; our translation) argues that « [a]t first glance, […] ambiguity [is] a problem that fascinates linguists, stylisticians or philosophers more than it does translators. » However, a translational approach to ambiguity and/or ambivalence cannot be ruled out. Faced with ambiguity, the translator has to make choices. When ambiguity is intentional, it must be preserved. Conversely, in the case of accidental ambiguity, the meaning must be clarified (Rydning 1998). Today’s increasingly powerful machine translation tools generally succeed in avoiding ambiguity. However, the proofreading and post-editing stages remain indispensable in most cases.

    Without excluding essentially theoretical approaches, this symposium intends to submit the concepts of ambivalence and ambiguity to the test of corpora, in order to evaluate their scope and limits in context. Consequently, the aim will be to apprehend cases of interpretative duality within a variety of oral and written corpora. These may be of various kinds (advertising, literature, political discourse, the press, computer-mediated communication, lexicographic data, etc.) This will enable a wide-ranging, cross-disciplinary exploration of these phenomena. Priority will be given to French, English and Spanish, but other languages and language families may also be considered.

    Proposals may be structured, in an indicative and non-limitative way, around the various topics mentioned in this call, in particular:

    • definitions and effects of ambiguity and ambivalence, the role of polysemy and context; in what cases can the relationship between the value of a morpheme and its context pave the way for an ambivalent interpretation?
    • is referential vagueness necessarily ambiguous? For example, with regard to issues of pinpointing grammatical reference (first-person plural pronoun nous in French – cf. Monte 2022 –, omission of the subject personal pronoun in Spanish, and so on…).
    • what are the possible effects of having a double interpretation of the same utterance, which may involve compatible interpretations that blend with each other, or that prove incompatible despite resisting disambiguation?
    • on the enunciative level, in the field of reported discourse, under what conditions are the complex forms of representing otherness (cf. Authier-Revuz 2020) a source of ambiguity? It is sometimes unclear who is speaking, and attributions to two different enunciative sources are sometimes incompatible, and sometimes ambivalent – the superposition of voices or points of view exhibited by represented utterances thus becoming included in the resources deployed by the primary speaker/enunciator (Germoni and Stolz 2019). And what then becomes of the division between narration, dialogue and reported thoughts in the overall narrative structure?
    • in translation, is it always possible to assess the intentional or accidental nature of ambiguity? What impact(s) can the retention or non-retention of ambiguity and/or ambivalence have? The question of untranslatable cases or translation failures can also be looked into.

    Guidelines for submission and important dates:

    • please send an anonymous submission (one to two pages maximum, including the title, an abstract, a few bibliographical references) before 15th January 2025 in Word and/or pdf format to the following address: ambiguity-tln@sciencesconf.org Please clearly indicate the name and affiliation of the author(s) in the body of the email.
    • reply to authors: no later than 30th March 2025
    • 27th and 28th November 2025: conference at the Université de Toulon, France

    Ambigüedad/ambivalencia (sintáctica, semántica o enunciativa) en lingüística

    La ambigüedad es un concepto provechoso en lingüística, y formaría incluso “parte integrante del modelo”, según A. Culioli ([1973] 1999: 48). Este término, también utilizado en el lenguaje corriente y la vida cotidiana, corresponde a la “intuición fundamental [de que] algo doble se oculta bajo una apariencia de unicidad” (Le Goffic, 1982 : 83 – 84). Si la polisemia de algunos morfemas lexicales o gramaticales suele generar ambigüedad, esta puede situarse asimismo a nivel de la proposición y, por lo tanto, de la frase, cuando una configuración de marcadores se presta a varias interpretaciones: la ambigüedad sintáctica se acompaña entonces de una ambigüedad semántica. Sin embargo, la mayoría de las veces, el recurso a un contexto más riguroso, o el examen más profundo de otras marcas gramaticales o enunciativas presentes en el enunciado permiten eliminar la ambigüedad. De hecho, tales fenómenos implican necesariamente la relación entre las formas lingüísticas y el co(n)texto, que le corresponde al lingüista analizar.

    Aun así, hay casos en los que no es posible desambiguar la secuencia y optar con certeza por una categoría en vez de otra, en la medida en que los indicios sintácticos no son suficientemente significativos o dan resultados contradictorios y el contexto no basta para descartar la ambigüedad. Ahora bien, los lingüistas se suelen inspirar en estos fenómenos inclasificables: podemos pensar en la “teoría del resto” de Jean-Jacques Lecercle. Sobre la base de una metáfora biológica, puede tratarse también de ejemplos de fenómenos “híbridos” (cf. Guillaume 2014). Por su parte, P. Le Goffic (1982) acude al concepto de “ambivalencia” originalmente utilizado en las teorías psicoanalíticas para designar estados psíquicos contradictorios. Según Catherine Fuchs (1995), la ambivalencia es una forma de transgresión que solo puede darse en el discurso, a diferencia de la ambigüedad que sería propia de la lengua. Las palabras “ambivalencia” y “ambigüedad” comparten la misma raíz latina ambo que significa “los dos, uno y otro” (RAE). Sin embargo, la primera parece tener un grado mayor de complejidad, ya que abarca fenómenos más heterogéneos y que no se pueden reducir a un único significado. Consecuencia inevitable de la indeterminación de la lengua o producto de la estrategia discursiva del locutor, unas “zonas turbias” (Le Goffic 1982: 83) se van generando y le incumbe al interlocutor desentrañarlas. Frente a un ideal de no equivocidad, tanto la ambivalencia como la ambigüedad pueden representar un peligro. El mayor riesgo de malentendido nos invita a cuestionar la dimensión ética del uso de estas formas dúplices.

    Michel Ballard (1990:153) sostiene que “a primera vista, […] la ambigüedad es un problema que apasiona más a los lingüistas, especialistas de estilística y filósofos que a los traductólogos”. Con todo, no se puede excluir un enfoque traductológico, puesto que ante la ambigüedad, el traductor tiene necesariamente que tomar decisiones. Cuando es intencional, la ambigüedad tiene que mantenerse. Por lo contrario, los casos de ambigüedades fortuitas tienen que resolverse (Rydning 1998). Por otra parte, en la traducción automática, las herramientas actuales cada vez más eficaces consiguen generalmente evitar los casos de ambigüedad. Sin embargo, la etapa de revisión y de postedición sigue siendo indispensable en la mayoría de los casos.

    Sin excluir enfoques esencialmente teóricos, este coloquio pretende someter los conceptos de ambivalencia y de ambigüedad a la prueba de los corpus con el fin de evaluar su alcance y sus límites en contexto. Por lo tanto, se tratará de acercarnos a los casos de dualidad interpretativa en unos corpus de estudio variados, orales o escritos. Estos podrán ser de distinta índole – publicidad, literatura, discurso político, prensa, comunicación mediada por ordenador, datos lexicográficos, etc.–, permitiendo de este modo una exploración amplia y transversal de estos fenómenos. Las lenguas de trabajo serán el español, el francés y el inglés, pero también se podrá aludir a otras lenguas o familias de lenguas.

    Las propuestas podrán articularse, de manera indicativa y no limitativa, en torno a los distintos ejes evocados en esta convocatoria, y en particular:

    • Definiciones y efectos de la ambigüedad y de la ambivalencia, papel de la polisemia y del contexto; ¿en qué casos las relaciones entre el valor de un morfema y el contexto permiten definir condiciones favorables a una interpretación en términos de ambivalencia?
    • ¿La vaguedad referencial es necesariamente ambigua? Por ejemplo, en lo que toca a los problemas de delimitación del referente (pronombre de primera persona del plural en francés –cf. Monte 2022–, omisión del pronombre sujeto en español, etc.).
    • ¿Cuáles son los efectos posibles del desdoblamiento de interpretaciones de un mismo enunciado, que pueden ser compatibles y acabar amalgamándose, o que resultan incompatibles, pero al mismo tiempo imposibles de disociar?
    • En el plano enunciativo, en el ámbito del discurso representado, ¿en qué condiciones las formas complejas de representación del discurso ajeno (Authiez-Revuz 2020) son fuentes de ambigüedad? A veces no se sabe quién habla, y las atribuciones del discurso a dos fuentes enunciativas diferentes son a veces incompatibles, y/o ambivalentes. La superposición de voces o de puntos de vista adoptados por los enunciados representados van formando parte de los recursos del locutor/enunciador primero (Germoni et Stolz 2019). ¿Y qué ocurre con la división entre narración, diálogos y pensamientos en la estructura narrativa global?
    • A la hora de traducir, ¿se puede evaluar siempre el carácter intencionado o fortuito de la ambigüedad? ¿Qué incidencia(s) puede tener la conservación o no de la ambigüedad y/o de la ambivalencia? Se podrá plantear asimismo la cuestión de los casos intraducibles o de los casos de fracaso de la traducción.

    Envío de propuestas y calendario:

    • las propuestas de comunicación anónimas (máximo de una o dos páginas, incluyendo el título, un resumen y unas referencias bibliográficas) deberán enviarse antes del 15 de enero de 2025 en formato Word y/o en PDF a la siguiente dirección:
      ambiguity-tln@sciencesconf.org
      Por favor, indique claramente el apellido y la institución a la que pertenece el autor (o los autores) en el cuerpo del correo electrónico.
    • respuesta a los autores: antes del 30 de marzo de 2025.
    • 27 y 28 de noviembre de 2025: coloquio en la Universidad de Tolón, Francia

    Bibliographie indicative / Main references / Bibliografía indicativa:

    • AUTHIER-REVUZ, Jacqueline, 2020, La Représentation du Discours Autre, Berlin/Boston : De Gruyter.
    • BALLARD, Michel, 1990, « Ambigüité et traduction ». La traduction plurielle, Michel Ballard (dir.), Villeneuve d’Ascq : Presses universitaires du Septentrion, 153-174. —, 2001, Le nom propre en traduction, Gap : Ophrys.
    • BENÍTEZ SOTO, Victoria, 2002, « Delimitación conceptual del fenómeno pragmático de la ambigüedad », M. Villayandre Llamazares, (coord.), Actas del V Congreso de Lingüística General. vol. 1, pp. 399-408, León : Universidad de León.
    • BRES Jacques, 2003, « Mais oui, il était un joli temps du passé comme les autres, le petit imparfait hypocoristique » Langue française, 138, Temps et co(n)texte, sous la direction de Jacques Bres, 111-125.
    • BRISSET, Frédérique, COUSSY, Audrey, JENN, Ronald & LOISON-CHARLES, Julie (Dirs.), 2019 ? Du jeu dans la langue. Traduire le jeu de mots, Lille : Presses Universitaires du Septentrion.
    • CORMINBOEUF Gilles, 2014 (avec M.-J. Béguelin & L. A. Johnsen) éditeur du numéro thématique de Verbum XXXVI-1, Réanalyses, indétermination catégorielle et flou sémantique, 233 p.
    • Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL). https://www.cnrtl.fr/ CULIOLI, Antoine, [1986] 1990, « Stabilité et déformabilité en linguistique. » Pour une linguistique de l’énonciation. Opérations et représentations. Tome I : 127-34. Paris : Ophrys.
    • —, [1973] 1999. « Sur quelques contradictions en linguistique. » Pour une linguistique de l’énonciation. Formalisation et opérations de repérage. Tome II : 43-52. Paris : Ophrys.
    • DE COLA-SEKALI, Martine, 1992, « Subordination temporelle et subordination subjective : quelques paramètres de mise en place des notions relationnelles de temps et de cause avec le connecteur polyvalent since. » Travaux linguistiques du Cerlico 5. Subordination, subordinations. J. Chuquet et D. Roulland, éds. 130-157.
    • DE MATTIA-VIVIES, Monique, 2010, « Du discours rapporté mimétique aux formes intrinsèquement hybrides. » Anglophonia. French Journal of English Linguistics. 14 (28) : p. 151‐180. Toulouse : PU du Mirail.
    • DUBOIS, Jean et al., 1999, Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage. Paris : Larousse-Bordas.
    • DELABATISTA, Dirk, 2008, “Wordplay as a translation problem: A linguistic perspective”, In 1. Teilband: Ein internationales Handbuch zur Übersetzungsforschung, pp. 600–606. De Gruyter Mouton. https://doi.org/10.1515/9783110137088.1.6.600, https://www.degruyter.com/document/doi/10.1515/9783110137088.1.6.600/html
    • ERMAKOVA, Liana & al. 2022, Overview of JOKER@CLEF 2022: Automatic Wordplay and Humour Translation Workshop, In: Barrón-Cedeño, A., et al. Experimental IR Meets Multilinguality, Multimodality, and Interaction. Lecture Notes in Computer Science, vol 13390. Springer, Cham. https://doi.org/10.1007/978-3-031-13643-6_27
    • FUCHS, Catherine, 1995. « Ambiguïté et ambivalence : le discret et le continu. », dans VANDERLYNDEN, Anne-Marie (dir.), 1995, Cahiers du CRIAR, n° 14, « Ambiguïtés/ ambivalences », Actes du colloque de Rouen, 13-14-15 mai 1994, Rouen : Publications de l’Université de Rouen.
    • FUCHS, Catherine, 1996, Les ambigüités du français, Collection l’essentiel français, Paris : Ophrys.
    • FUCHS, Catherine, 1997, « L’interprétation des polysèmes grammaticaux en contexte », G. Kleiber et M. Riegel (éds.) Les formes du sens, Louvain-la-Neuve : Duculot, 127-133.
    • GARDELLE, Laure, 2023, “Lions, flowers and the Romans: exception management with generic and other count plurals.” L. Gardelle, L. Vincent-Durroux et H. Vinckel-Roisin (Eds). Reference: from Conventions to Pragmatics. John Benjamins: 71-87.
    • GARDELLE, Laure et LANDRAGIN, Frédéric, 2023, « Le flou, le vague et la sous- détermination dans la référence. » Appel à soumissions pour un numéro thématique de Lingvisticæ Investigationes.
    • GERMONI Karine & STOLZ Claire (dir.), 2019, Aux marges des discours rapportés. Louvain- la-Neuve : Éd. Académia-L’Harmattan.
    • GOSSELIN, Laurent, 2005, Temporalité et modalité. Louvain-la-Neuve : De Boeck Supérieur.
    • GUILLAUME, Bénédicte, 2014, A Corpus-Based Study of Since-Clauses in Contemporary English. Collection Interlangues sous la direction de Wilfrid Rotgé, Toulouse : Presse Universitaires du Mirail.
    • GUTIÉRREZ ORDÓÑEZ, Salvador, 2002, De pragmática y semántica. Madrid : Arco Libros.
    • KERBRAT-ORECCHIONI Catherine, 2005, « L’ambigüité : définition, typologie. » Les jeux et les ruses de l’ambigüité volontaire dans les textes grecs et latins, Actes de la Table Ronde organisée à la Faculté des Lettres de l’Université Lumière-Lyon 2 (novembre 2000). pp. 13-36, Lyon : Maison de l’Orient et de la Méditerranée Jean Pouilloux.
    • LECOLLE, Michelle, 2019, Les noms collectifs humains en français : enjeux sémantiques, lexicaux et discursifs, Limoges, Lambert Lucas.
    • LE GOFFIC, Pierre, 1982, « Ambigüité et ambivalence en linguistique » Documentation et recherche en linguistique allemande contemporaine, Des bords au centre de la linguistique. pp. 83-105, Vincennes, n°27. htt ps:/ /www.persee.fr/do c/drlav_0754 – 9296_1982_num_27_1_983
    • LE GOFFIC, Pierre, 1987, « Sur l’ambigüité des relatives / interrogatives indirectes en “ce qui”, “ce que” », in C. Fuchs éd. L’ambigüité et la paraphrase. Opérations linguistiques, Processus cognitifs, Traitements automatisés. Centre des publications de l’Université de Caen.
    • LEONARDUZZI, Laëtitia, 2004, La subordonnée interrogative en anglais contemporain, Aix- en-Provence : Publications de l’Université de Provence.
      LÓPEZ-CORTÉS, Natalia, 2020, « El lenguaje será ambiguo o no será: el porqué de la ambigüedad léxica y su estudio desde la evolución del lenguaje », E-AESLA, n° 6, pp. 117- 128.
    • MONTE, Michèle, 2022, « Le nous dans les journaux militants : le cas de La Chronique d’Amnesty International et du Journal d’ATD Quart Monde », dans BOUZEREAU Camille, MAYAFFRE, Damon et MONTAGNE, Véronique (dir.), Le roi disait “nous voulons”. Usages et fonctions du nous dans le discours politique, Cahiers de praxématique 77, en ligne.
    • RABATEL, Alain, 2022, « L’intrication des discours représentés et de la narration dans les romans noirs de Dominique Manotti », Le Français moderne, vol. XC, t. 2, p. 241-265.
    • RASTIER F., CAVAZZA M., ABEILLÉ A., 1994, Sémantique pour l’analyse – De la linguistique à l’informatique, Paris : Masson.
    • RYDNING, Antin F., 1998, « La notion d’ambigüité en traduction » dans Tradterm, 5(1), 11- 40. https://doi.org/10.11606/issn.2317-9511.tradterm.1998.4977373
    • VANDERLYNDEN, Anne-Marie (dir.), 1995, Cahiers du CRIAR, n° 14, « Ambiguïtés/ ambivalences », Actes du colloque de Rouen, 13-14-15 mai 1994, Rouen : Publications de l’Université de Rouen.
    • VICTORRI, Bernard, 1997, « La polysémie : un artefact de la linguistique ? », Revue de Sémantique et Pragmatique, 2, 41-62. halshs-00009273v1
    • WINTER-FROEMEL Esme et DEMEULENAERE Axel, 2018, Jeux de mots. Textes et contextes, Berlin-Boston, De Gruyter, vol. 7 de la collection « The Dynamics of wordplay ».

    Comité d’organisation / Comité scientifique

    Comité organisateur

    Bénédicte Guillaume, Élise Mathurin, Michèle Monte, Vanessa Saint-Martin

    Université de Toulon

    Comité scientifique

    Audrey Coussy (McGill University)

    Barbara Dancygier (University of British Columbia)

    Antin Fougner Rydning (Universitetet i Oslo)

    Laure Gardelle (Université Grenoble-Alpes)

    María Isabel González-Rey (Universidad de Santiago de Compostela)

    Michelle Lecolle (Sorbonne Nouvelle)

    Laëtitia Leonarduzzi (Université d’Aix-Marseille)

    Natalia López-Cortés (Universidad de Zaragoza)

    Blandine Pennec (Université Toulouse II – Jean Jaurès)

    Myriam Ponge (Université Paris 8)

    Fabio Reggatin (Università degli Studi di Udine)

    Corinne Rossari (Université de Neuchâtel)

    Pascale Roux (Université Lumière Lyon 2)

    Mohamed Saki (Université de Bretagne Occidentale)

    Martine Sekali (Université de Nanterre)

    Denis Vigier (Université Lumière Lyon 2)

    Esme Winter-Froemel (Universität Würtzburg)

  • Styles, genres, auteurs 21

    Richard de Fournival, Crenne, Corneille, Staël, Vigny, Koltès

    Lise Charles Florence Leca Mercier

    Rayon : Littératures françaises, comparée et langue
    Collections : Styles, genres, auteurs

    Présentation sur Sorbonne Université Presse

    ISBN : 979-10-231-0811-8
    Date de publication : 07/11/2024
    Format : 14,5 x 21 cm, Nombre de pages : 250

    Présentation

    Présentation sur Sorbonne Université Presse

    Se trouve ici réunie une série d’études consacrées au programme de la session 2025 des épreuves de grammaire et stylistique française : Le Bestiaire d’amour de Richard de Fournival, Les angoisses douloureuses qui procèdent d’amour d’Hélisenne de Crenne, Le Menteur, La Suite du Menteur et La Place Royale de Pierre Corneille, De la littérature de Mme de Staël, les Poèmes antiques et modernes et Les Destinées d’Alfred de Vigny, Dans la solitude des champs de coton et Combat de nègre et de chiens de Bernard-Marie Koltès. En appuyant leurs analyses sur des aspects linguistiques, lexicales, génériques ou poétiques, les contributeurs de ce volume illustrent l’apport de la lecture stylistique à l’interprétation des textes.

    Table des matières

    Richard de Fournival

    Géraldine Veysseyre, Des fragments d’un discours amoureux au Bestiaire d’Amour, ou le choix de la

    prose pour « parler [d’amour] plus forment »

    Hélisenne de Crenne

    Mireille Huchon, Dame Helisenne : un style imaginé à plaisir

    Pierre Corneille

    Mathilde Morinet, « Invente à m’éblouir quelques nouveaux détours » : virtuosités rhétoriques et spectacle de la parole dans Le Menteur de Corneille

    Lauriane Maisonneuve, Docere ridendo : l’écriture sentencieuse dans les comédies de Corneille

    Germaine de Staël

    Sandra Poujat, Le style républicain de Staël : hériter des imaginaires langagiers de l’Ancien Régime et de la Révolution

    Hélène Parent, Redéfinir l’idéal d’un(e) moderne Cicéron(e) après la Révolution

    Alfred de Vigny

    Jean-Michel Gouvard, Rimes, vers et strophes dans les poésies d’Alfred de Vigny

    Pierre Fleury, « Le hamac d’autrefois » : le je lyrique dans la poésie de Vigny

    Bernard-Marie Koltès

    Edoardo Cagnan, De quoi parle Combat de nègre et de chiens de Koltès : texte, avant‑texte et paratexte

    Élise Nottet-Chedeville, La « surlittérarité » koltésienne : mythe ou réalité ?

    Bibliographie

    Résumés

  • L’épistolier-lecteur

    Styles de lettres, styles de vies

    L’épistolier-lecteur. Styles de lettres, styles de vies.

    Séminaire du Centre d’Étude des Correspondances et Journaux Intimes, CECJI, ÉA 7289

    Année 2025

    Responsable : Marianne Charrier-Vozel

    Contact pour la visioconférence : marianne.charrier@univ-rennes.fr

    Programme

    Vendredi 17 janvier 2025

    Vendredi 14 février 2025

    14h-15h30 en visioconférence
    Jürgen SIESS, Université de Caen
    « Rilke épistolier. L’image du lecteur »

    Vendredi 21 mars 2025

    14h-15h30
    Geneviève HAROCHE-BOUZINAC, Université d’Orléans
    « Usages de la lecture dans les lettres de Madame de Sévigné »

    Vendredi 13 juin 2025

    14h-15h30
    Antonia ZAGAMÉ, Université de Poitiers
    « La recherche du bel endroit, un habitus de lecteur de Diderot dans la correspondance à Sophie Volland »

    Vendredi 26 septembre 2025

    14h-15h30
    Suzanne DUVAL, Université  Gustave Eiffel
    « La bibliothèque des épistoliers médecins du XVIIe siècle est-elle ancienne ou moderne? L’exemple de Samuel Sorbière et de Guy Patin »

    Vendredi 10 octobre 2025

    14h-15h30
    Bruno BLANCKEMAN, Université  Sorbonne Nouvelle Paris-3
    « Le « lire-écrire » critique de Marguerite Yourcenar dans sa correspondance »

    Vendredi 14 novembre 2025

    14h-15h30
    Gwenaëlle SIFFERLEN, Université de Bourgogne
    « De Victor Hugo à Juliette Drouet : lire, copire*, écrire »

    Informations pratiques 

    Organisé par Centre des correspondances et journaux intimes des XIX et XXe siècles – CECJI (EA7289)

    Séminaire du 17 janvier 2025 au 15 novembre 2025

    Faculté des Lettres et Sciences Humaines
    20, rue Duquesne
    Brest

    Les séances peuvent être suivies en visioconférence sur inscription, contact : marianne.charrier@univ-rennes.fr.

  • Gilles Philippe, Une certaine gêne à l’égard du style

    Gilles Philippe, Une certaine gêne à l’égard du style, Bruxelles, Les Impressions Nouvelles, 2024, 246 p.

    […]Poursuivant le chemin entamé il y a une vingtaine d’années entre stylistique et critique littéraire, et marqué par une demie douzaine d’ouvrages, G. Philippe, professeur ordinaire à l’Université de Lausanne, continue de décliner son approche transversale du style littéraire moderne et de ses imaginaires. Défenseur d’une stylistique historique désauteuriste, il a notamment publié Sujet, verbe, complément. Le moment grammatical de la littérature française (1890-1940) (2002), puis Le rêve d’un style parfait (2013) et plus récemment Pourquoi le style change-t-il ? (2021), qui porte sur les évolutions stylistiques collectives. Le présent volume développe une thématique, ou plus exactement une problématique rarement abordée par la critique : les tensions théoriques et pratiques autour du style. Cela revient, du moins en partie, à réexaminer le changement stylistique non plus en diachronie mais en synchronie, tout en s’appuyant sur l’évolution générale des pratiques rédactionnelles, que G. Philippe connaît très bien depuis La langue littéraire. Une histoire de la prose en France de Gustave Flaubert à Claude Simon (2009), l’ouvrage collectif qu’il a codirigé avec J. Piat. Sa réflexion s’inspire ouvertement de la critique déconstructionniste des années 1980 : « ce que nous percevons comme un style, dans sa possible originalité et dans son idéale unité, n’est rien d’autre que le résultat d’options contradictoires et la sédimentation de tensions rédactionnelles » (p. 6). Fondé sur des enquêtes minutieuses portant à la fois sur les œuvres littéraires, les écrits théoriques et la réception critique d’une série d’écrivains, l’essai vise à dégager une typologie et des tendances générales. Il est constitué de sept chapitres équilibrés, portant chacun sur un auteur majeur et/ou mineur du XXe siècle suivant l’ordre chronologique, d’une section consacrée aux sources et aux remerciements, et enfin d’un index des noms propres.

    L’introduction (« Malaises de Bergotte » p. 5-18) expose que « chaque projet esthétique » est « confronté à des injonctions contradictoires et les gère à sa façon » (p. 7). Il existe « trois grandes options » : privilégier une injonction, tenter un compromis entre les injonctions contradictoires ou chercher « une solution tierce […] au risque que cette solution n’engendre une nouvelle tension » (p. 7). Pour expliquer la suspension du « principe de cohérence » (p. 8), G. Philippe rappelle le principe présenté dans son précédent livre, consacré au changement stylistique, à savoir que « [c]haque génération doit […] conjuguer les impératifs et habitudes stylistiques encore vivaces des décennies qui ont précédé et les valeurs et pratiques qui sont en train de s’imposer » (p. 13). L’objectif est triple : typologique – « tensions dans la doctrine elle-même, tensions entre la doctrine professée et la pratique effective, tensions entre les formes rédactionnelles mises en œuvre dans un même texte » (p. 18) –, historique – les tensions repérées sont-elles révélatrices d’une tension plus générale ? – et surtout ontologique puisqu’il s’agit de « faire valoir […] que la tension stylistique est le mode d’existence naturel des œuvres littéraires » (p. 18).

    Le parcours d’écrivains qui permet de dégager les différentes modalités des tensions stylistiques dans la théorie et/ou dans la pratique commence par « La double postulation stylistique de Ramuz » (p. 19-46). Dans la pensée, il existe une tension entre les deux principales revendications rédactionnelles de l’auteur « qui sont le ton de l’oral spontané et « un parler local opposable au parler “de Paris” » (p. 19). Dans la pratique, une langue populaire et locale coexiste avec des tours qui font « écho à l’impressionnisme littéraire “artiste” de la fin du XIXe siècle » (p. 34), comme en témoignent la « marqueterie des temps de la conjugaison » (p. 37) ainsi que l’usage du point de vue et du discours rapporté. L’esthétique « continuiste » du XIXe siècle et l’esthétique « discontinuiste » qui émerge dans le premier tiers du XXe siècle coexistent chez Ramuz, complexité que la tradition critique avait simplifiée « pour sauver la cohérence » (p. 49).

    « La demi-démesure de Bernanos » fait l’objet du chapitre II (p. 47-77). G. Philippe, qui a préfacé l’édition des œuvres romanesques complètes de cet auteur dans la collection « Bibliothèque de la Pléiade » (Gallimard), observe une double série de tensions :

    (la référence répétée à l’enfance dans une œuvre dont la prose récuse tout « esprit d’enfance » ; la convocation d’une langue esthétisée jusqu’à la décadence dans une œuvre qui fait le procès de la littérature) pour mettre au jour une autre série de tensions : le recours à la démesure expressionniste comme solution à un problème proprement stylistique, la conscience que cette démesure n’est qu’un autre piège tendu par la littérature […] et le choix bien périlleux de ce qu’il convient alors d’appeler une demi-démesure comme compromis entre des forces contradictoires. (p. 49)

    En s’appuyant sur les imaginaires du temps, l’auteur de l’essai rapproche le langage de l’enfance d’« une littérature dont le style ne soit pas ou du moins pas trop littéraire » (p. 50), mettant en évidence l’ambiguïté du discours scolaire sur le rapport entre langue et littérature, au moment où Bernanos était scolarisé : le culte des grands auteurs coexiste avec « la méfiance envers l’écriture littéraire » (p. 57). Loin du langage de l’enfance, « [a]vec l’éloquence, le lyrisme est la deuxième pente naturelle de Bernanos » (p. 63), mais sa prose romanesque est surtout « expressionniste » (p. 65). Partagé en somme entre la fascination pour la belle langue et « l’idéal de l’enfance et de la sainteté », Bernanos est un exemple « un peu facile d’un principe […] qui veut que les pratiques rédactionnelles soient constamment traversées de tensions voire d’injonctions contradictoires que l’écriture a parfois pour but de neutraliser, parfois même de masquer » (p. 77).

    Le chapitre III, « Légères tensions, petits tiraillements » (p. 79-109), s’intéresse à Simenon puis à l’écrivaine suisse Catherine Colomb en guise de contrepoint, pour illustrer la thèse qu’ « il n’est probablement aucun texte qui ne présente des tiraillements entre des options stylistiques disponibles ou souhaitées » (p. 79). Simenon fait partie des écrivains au « statut littéraire mal assuré », pour lesquels « la question du style est toujours parasitée par celle de la légitimité » (p. 79). G. Philippe entend montrer qu’il offre pourtant bien « un style d’auteur, répondant aux exigences que la modernité pose aux œuvres pour vérifier la nature proprement littéraire de leur écriture » (p. 79), à savoir l’originalité et la cohérence. Il s’appuie sur quelques-uns des récits de la « période Fayard » – dont les bornes chronologiques auraient pu être indiquées –, au cours de laquelle Simenon a publié sous son nom de naissance. En vertu du principe que « les tensions stylistiques peuvent être en partie ramenées à la confluence de deux courants contraires à un moment donné de l’histoire littéraire » (80), les œuvres de Simenon participent à la fois des pratiques rédactionnelles « du roman impersonnel, subjectiviste voire impressionniste, héritées du second XIXe siècle », et de la « sensibilité expressionniste » (p. 80). L’effacement du narrateur « permet d’adopter la perspective d’une conscience désignée à la troisième personne » (p. 81-82).
    Pour traiter de l’impressionnisme stylistique de Simenon, G. Philippe rappelle au préalable

    que bien des pratiques rédactionnelles sont contraintes par la volonté d’écrire différemment d’encombrants prédécesseurs, mais il s’avère que l’angoisse la plus fréquemment exprimée par les écrivains concerne paradoxalement la possible influence de leur style « spontané » sur l’écriture à laquelle il [sic] souhaite aboutir […]. (p. 83)

    L’impressionnisme stylistique s’appuie sur un « travail sur la grammaire et surtout sur le verbe » (p. 86) : « l’emploi fréquent de l’imparfait dans des séries de verbes qui appellent plutôt le passé simple », « le recours massif à l’animisme grammatical » (ibid.), avec des tours regroupés sous l’étiquette « phénoménisme » (« le réel n’y est plus donné pour lui-même, mais en tant qu’il fait ou peut faire l’objet d’une perception, le phénomène étant alors présenté indépendamment de sa cause ou de son origine » (p. 87)). Bernanos évite les traits « les plus voyants » de l’écriture « artiste », notamment l’inversion emblématique « qui consiste à substantiver l’épithète de sorte qu’elle devienne la tête du groupe nominal, le référent se voyant rejeté en seconde position et la qualité l’emportant sur l’objet » (p. 88).
    La tendance à l’expressionnisme, quant à elle, repose en premier lieu sur la présentation d’un monde et donc d’un vocabulaire dégradé, faisant l’objet d’une « insistance pessimiste » incarnée par une « intensification lexicale ou grammaticale » (p. 91). Plus mesuré encore que son impressionnisme, l’expressionnisme de Bernanos « se heurte à sa volonté de contenir les métaphores et à la répugnance de toute son époque pour les adjectifs » (p. 92). En second lieu, l’expressionnisme s’incarne dans « la présence d’un regard et d’une voix, ou au moins d’un ton, en rupture avec la narration impersonnelle qui est la condition d’être des textes impressionnistes » (p. 93) : la focalisation interne et le discours indirect libre en sont caractéristiques. Mais dans le même temps les romans de Simenon sont parcourus de questions et d’exclamations attribuables à un narrateur car « Simenon ne veut pas faire trop “littéraire”, et sa prose est […] plus proche de celles des romanciers de la veine populiste » (p. 96). Deux traits de modernité sont la phrase sans verbe et la parataxe (suppression des connecteurs).
    À l’instar de Ramuz, Simenon semble donc avoir « voulu céder à la fois à deux tentations contradictoires » (p. 98) : une tentation continuiste (impressionnisme) et une tentation discontinuiste (expressionnisme). Ces tensions se seraient stabilisées et sédimentées par la suite pour former le style de Simenon.

    Le chapitre se clôt sur une section consacrée aux romans de Catherine Colomb parus à partir de 1934, dont la « prose […] réputée difficile et à fort rendement esthétique » (p. 99) présente des « tiraillements rédactionnels » comparables mais en dérogeant par le lyrisme au modèle hérité. L’ « idéologie du style » occulte ces tensions ou tente là encore de les interpréter à tout prix dans un projet esthétique cohérent (p. 109).

    C’est la théorie de Valéry qui fait l’objet du chapitre IV (111-141), lequel s’appuie sur le Cours de poétique de l’écrivain tel que publié par William Marx en 2023. Le principe cardinal de Valéry est que « l’écrivain a vocation à explorer les potentialités de la langue […] » (p. 112), mais aussi, de manière conformiste, le style comme « signature idiolectale » (p. 113). La contradiction est forte, puisque « l’apologie spontanée de l’originalité se teinte souvent d’un soupçon de méfiance envers toute idolâtrie de la nouveauté » (p. 114). « Cette tension entre une conception (disons, néoromantique) purement singularisante du style et le maintien (disons, néoclassique) d’un idéal désingularisé » (p. 114) serait en fait « une simple question de niveaux. La phrase avec ses composants lexicaux, ses tours grammaticaux, ses figures, sera le lieu de l’innovation et de la singularisation ; le texte, en revanche, sera le lieu où se maintient une règle qui s’impose à tous, celle de la continuité » (p. 115). La continuité recherchée est « finalement moins textuelle qu’énonciative », elle est assurée par le maintien de la « voix », c’est-à-dire « par l’omniprésence du je » (p. 120), ce qui permet de « dénouer la tension » entre une double exigence, le singulier et le collectif, l’un et l’autre étant « également nécessaires à la création d’un effet de voix » (p. 120).

    À l’issue de ce parcours des écrits de Valéry sur plusieurs décennies, G. Philippe se tourne vers le cours du Collège de France, qui ouvre une perspective différente, où les tensions stylistiques semblent encore plus vives :

    La poétique prônée par Valéry se veut sinon collective du moins générale et même impersonnelle ; il s’agit de mettre au jour les conditions d’apparition et les modalités de fonctionnement des œuvres sans les ramener à des séries de cas particuliers. On comprend dès lors que la notion du style n’y trouve pas aisément sa place, puisqu’elle désigne pour Valéry la signature rédactionnelle d’un écrivain singulier. (p. 125)

    À la gêne de Valéry face au style s’ajoute sa gêne vis à vis de la stylistique. Il est néanmoins possible « de reconstituer dans le cours les premiers éléments d’une stylistique valéryenne, ou du moins quelques options en vue de la description proprement stylistique des textes. […] le privilège donné à la dimension sonore des faits de langue sur leur dimension lexicale et le faible intérêt accordé aux faits grammaticaux » (p. 133). De plus « la syntaxe n’est jamais considérée pour elle-même par Valéry, mais seulement comme lieu d’appariement des items lexicaux » (p. 134), en d’autres termes « les règles d’agencement des mots dans la phrase relèvent d’une contrainte préétablie comparable aux règles de l’alexandrin classique » (p. 135). Dans ces conditions, « la seule catégorie grammaticale qui intéresse vraiment Valéry [est] l’épithète » (p. 135), parce qu’elle rapproche les termes : « il n’est pas nécessaire d’avoir un lexique étendu et des termes rares pour obtenir le meilleur rendement sémantique : il suffit de jouer sur les acceptions et de travailler les rapprochements […] » (p. 136). G. Philippe aborde pour finir les réflexions de Valéry sur les rapports entre prose et poésie d’une part, et ceux que l’écrivain entretient avec les « bizarreries langagières » (p. 139) d’autre part.

    Le chapitre V, « Bariolages et bigarrures : Camus, 1942 » (p. 143-171), revient sur un roman fort étudié, L’Étranger, à partir d’une remarque de Barthes en 1944 : « le style de son livre repose sur une donnée contradictoire ». Dans un premier temps il décrit la « marqueterie stylistique » du texte, constituée notamment de contradictions énonciatives, qu’il illustre en relevant un certain nombre d’hésitations, « sur l’accord du subjonctif après un verbe recteur à l’imparfait » ou « dans la construction de l’infinitif » (p. 145). C’est l’emploi du discours indirect libre principalement qui a suscité « le sentiment d’un étrange changement de ton à la toute fin du récit » (147), mais c’est aussi l’hésitation « entre volonté d’éviter et volonté d’organiser la textualisation des énoncés » (p. 148), qui passe par l’alternance de phrases simplement juxtaposées et de phrases liées par des connecteurs. Enfin l’instabilité stylistique repose sur l’hésitation entre la simplicité narrative et des « tours ou des images dont la recherche détonne » (p. 152). Mais selon les critiques, « [à] chaque fois […] le lieu de la contradiction se déplace : il est dans le style de l’auteur pour Sartre, dans le ton du récit pour Blanchot, entre le projet de l’œuvre et ses modalités rédactionnelles pour Barthes, entre le personnage du roman et les mots qu’on lui prête pour Nathalie Sarraute (…) » (p. 155). Si l’on compare le texte de 1942 avec les « légères modifications » que Camus lui a apportées « au fil des premières réimpressions » (p. 157), le principe selon lequel « le retravail post-éditorial est généralement guidé par la première réception publique de l’œuvre » (p. 157) semble avoir été respecté. Si ces modifications ne présentent pas de « systématicité », elles sont « congruentes » (p. 158). Elles obéissent à une « visée principalement stylistique, à deux exceptions près […] » (p. 158), qui consiste en l’évitement des « répétitions de mots en contexte étroit, soit par suppression, soit par substitution » (p. 159), la correction des « maladresses lexicales » et les « ajustements grammaticaux » (plus rarement) (p. 160). Le bilan est que « [r]ien de tout ceci ne suffit à modifier radicalement la couleur stylistique de L’Étranger, mais tout nous éloigne de la tonalité légèrement “parlée” que le roman semblait contractualiser en ses lignes initiales » (p. 161). Malgré tout, Camus semble avoir conservé « un certain malaise quant au style qu’il avait utilisé » (p. 162). En résumé, les injonctions contradictoires du style de L’Étranger sont

    la radicalité lyrique du style « spontané » de l’écrivain et l’exigence classique toujours revendiquée ; la nécessité de compenser, par des concessions à la langue romanesque stabilisée, la sécheresse d’une modernité emblématisée par les techniques dites alors « américaines » ; l’exigence d’un réalisme langagier appelé par la personnalité du narrateur et la volonté de fournir un texte qui reste littéraire, etc. (p.169)

    Si « [t]ous les textes présentent […], à un degré plus ou moins grand, des traces de polychronie stylistique […] » (p. 170), les premiers lecteurs ont été gênés par l’absence de cohérence du roman de Camus : « décalage entre ce que nous savons du narrateur et ce que nous voyons de sa langue, […] décalage entre diverses portions du texte, […] tension permanente entre deux modèles rédactionnels » (p. 170). Cette incohérence peut être jugée ininterprétable (c’est « la part d’échec » inévitable de toute œuvre littéraire) ou interprétable. Quoi qu’il en soit, « L’Étranger a vocation à demeurer un cas d’école, puisque la tension stylistique est le régime d’existence normal des textes littéraires » (p. 171).

    Le chapitre VI « Penser à hue, écrire à dia : Sartre, 1952 » (p. 173-203) est dédié à l’écrivain qui aurait été l’initiateur de la recherche des tensions rédactionnelles, peut-être pour « nier son propre malaise » (p. 173). G. Philippe met une nouvelle fois en évidence les trois types de tension possibles : « tension dans la pensée du style, tension entre la pensée et la pratique stylistique effective, tension entre les formes rédactionnelles au sein d’un même texte » (p. 174). « À la dichotomie poésie / prose va peu à peu se substituer une autre opposition, à l’intérieur même de la prose et dans l’œuvre elle-même » (p. 176) : les écrits « en style » et les écrits « sans style » (textes politiques et philosophiques). En plus du couplage qualité des appariements lexicaux / qualité des agencements syntaxiques, pour Sartre, dans les années 1960-1970, « la prose ne sera ainsi pleinement littéraire et le style pleinement style que si une autre exigence est respectée, une sorte de souci formulaire […] » (p. 188). Dans un second temps, l’auteur de l’essai évoque La Reine Albermarle (1951-1952), un livre inachevé dont les fragments qui nous sont parvenus « suivent une série de protocoles rédactionnels parfois bien différents » (p. 192). La contradiction réside dans le fait que Sartre a condamné la prose poétique dans ses écrits théoriques alors qu’il la pratiquait régulièrement et la trouvait pertinente. Sartre voyait dans la « surperception » « le fondement de l’expérience esthétique » (p. 197), et « dans l’image le mode privilégié d’expression littéraire de la surperception » (p. 199). Cela peut expliquer, dans La Reine Albermarle, « l’omniprésence de la métaphore, cet emblème même de la poétisation de la prose » (p. 199). Ce texte montre que « notre quotidien est fait de sensations fines et que, pour en rendre compte, il y a une nécessité expressive voire phénoménologique à recourir à une prose poétisée » (p. 202-203).

    Le dernier chapitre, « Le style pris à son propre piège » (p. 205-232), aborde une « nouvelle configuration » avec une écrivaine « au sommet du canon littéraire », Duras (dont G. Philippe a dirigé l’édition des œuvres complètes dans la « Bibliothèque de la Pléiade »), puis, en contrepoint, le cas plus spectaculaire de l’écrivain suisse Yves Velan. Dans les deux cas, « l’écrivain a rencontré un problème rédactionnel et cherché une solution stylistique qu’il a dûment mise en œuvre, mais cette solution s’est avérée un piège, au point qu’elle a soit créé un nouveau problème, soit accentué le problème précédent » (p. 205). Dans les années 1970, « Duras devient une écrivaine de la voix » (p. 205), tandis que Velan « veut lutter contre l’uniformisation des discours et des formes » (p. 205). G. Philippe enquête alors sur les occurrences du mot voix dans les romans de Duras d’un point de vue quantitatif, mais aussi qualitatif en étudiant les épithètes qui lui sont accolées. Le premier résultat est que « la densité du terme n’a rien de spectaculaire : 0,74 occurrence pour 1000 mots » (p. 206). Mais ce taux global masque des disparités, quantitatives et qualitatives, nettes entre les œuvres : « La densité d’apparition du mot ne permet donc nullement de proposer ou de confirmer une périodisation de l’œuvre de Duras ou de sa sensibilité à ce thème » (p. 207). « Inversement, des taux très différents peuvent masquer des fonctionnements assez proches (…) » (p. 208). Entre les deux conceptions de la voix (faculté des êtres humains à émettre des sons articulés ou « ce qui caractérise, par son timbre et ses intonations, une personne comme singularité sonore » p. 210), Duras semble avoir hésité […] » (p. 211). La « légère » tendance qui se dégage est que l’écrivaine a considéré « de plus en plus la voix […] dans sa matérialité sonore » (p. 211). Cependant l’instabilité de la voix est « une facette d’une instabilité plus générale » (p. 212), de la

    double postulation entre d’une part une fascination pour l’expérience la plus personnelle et la surexpression des sentiments les plus forts, et d’autre part – par simple impossibilité d’atteindre cette plénitude de la présence au monde et à soi – une tentation du neutre, de l’évanescence, de la sous-expressivité. (p. 212)

    G. Philippe rappelle l’importance de la catégorie de la voix pour la littérature narrative de la seconde moitié du XXe siècle, par opposition avec la catégorie de l’oral (pratiques langagières populaires, souci lexical, argot) qui a marqué la littérature de la fin du XIXe siècle et du premier tiers du XXe siècle, emblématisée par Céline. La période « vocale » se caractérise par le souci de l’oral commun (vs populaire) pour « faire entendre une voix derrière le texte » (p. 213), qui se donne lui-même comme un discours spontané non planifié, désigné par Duras elle-même par les expressions « écriture courante » et « écriture de l’urgence ». Les procédés langagiers en sont les ajouts au-delà du point final, les retours reformulatifs ou correctifs, la sous- ou surponctuation, les hésitations, l’incomplétude et l’assouplissement de la contrainte grammaticale. G. Philippe conclut de manière prudente et nuancée « qu’importe l’instabilité de la présence et des emplois du mot voix dans les récits, le style de Duras se serait peu à peu “vocalisé” » […] » (p. 215) tardivement, dans les années 1980, mais non de manière radicale. Il formule à partir de « ce décalage chronologique […] une première hypothèse : il y a peut-être quelque chose qui gêne Duras dans la voix, et cette chose, c’est peut-être le corps » (p. 216). En d’autres termes, Duras ne veut pas « la personnalité ou l’émotion » qui se reflètent dans la voix (p. 219). Ce chapitre illustre bien les apories de la recherche fondée sur la méthode quantitative, et de manière plus générale la difficulté de tout expliquer dans une œuvre littéraire, et de démontrer une hypothèse, en somme, les limites d’une démarche scientifique appliquée aux textes littéraires.

    De son côté, Velan veut lutter contre l’uniformisation en « empruntant à des protocoles rédactionnels peu compatibles » (p. 227), littéraires et non littéraires, mais il se trouve en échec (« désémantisation ») du fait qu’on ne peut pas échapper aux modèles. Cette section permet à G. Philippe de revenir rapidement sur les concepts d’intertextualité, de polyphonie et de postmodernité.

    En conclusion, le livre s’achève sur le constat que la tension « semble avoir traversé tout le siècle, dans la recherche d’un style qui soit à la fois littéraire et non littéraire » (236), et même le style avant-gardiste a cherché à s’inscrire dans la continuité de ce qu’il voulait détruire (p. 237).

    D’un plume alerte, l’essai théorique et critique de G. Philippe se présente à la fois comme une enquête presque policière et une réflexion subtile et nuancée, presque toujours clairement exposée, et solidement étayée à la fois sur une abondante documentation et sur une étude scrupuleuse des corpus.

    Sophie JOLLIN-BERTOCCH
    CHCSC (Centre d’Histoire Culturelle des Sociétés Contemporaines)
    Université Paris-Saclay, UVSQ

  • Manuel d’analyse du discours. Perspectives contemporaines

    Manuel d’analyse du discours.
    Perspectives contemporaines

    Parution novembre 2024

    Co-rédigé par 13 membres de Praxiling

    ISBN-13 9782807360556

    Éditions de Boeck Supérieur.

    Lien vers la présentation sur le site de l’éditeur

    Description

    Ce manuel présente de manière accessible les principaux outils méthodologiques de l’analyse du discours et montre comment on la met en œuvre sur un large éventail d’exemples attestés : articles de presse, interview télévisée, lettre de Poilu, sketch d’humoriste, fables, tweets et SMS, etc.

    Rédigé à plusieurs mains par des spécialistes des différents champs des sciences du langage (interaction, stylistique, phonétique, argumentation, gestualité, traitement automatique, etc.), il propose un aperçu de la discipline telle qu’elle se pratique aujourd’hui dans sa grande diversité.

    Il trouve son originalité dans son organisation autour d’entrées innovantes et dans l’application des notions et des outils à la diversité des discours écrits et oraux. Chacun des sept chapitres qui le composent offre une synthèse des principaux outils théoriques, une série d’exercices, leurs corrigés et quelques propositions de lectures pour approfondir chaque problématique.

    Avec les contributions de : Jacques Bres, Domitille Caillat, Frédéric Calas, Sascha Diwersy, Christelle Dodane, Corinne Gomila, Fabrice Hirsch, Giancarlo Luxardo, Aleksandra Nowakowska, Jean-Marc Sarale, Agnès Steuckardt, Maud Verdier et Bertrand Verine.

    Sommaire

    Introduction
    Chapitre I. Classification des discours
    Chapitre II. Énonciation
    Chapitre III. Structuration
    Chapitre IV. Production de sens
    Chapitre V. Hétérogénéité(s) énonciative(s)
    Chapitre VI. Argumentation
    Chapitre VII. Analyses outillées
    Corpus
    Index

    Corpus

    D01. ALLOCUTION DU PRÉSIDENT E. MACRON
    D02. LETTRE D’UN POILU DE LA GRANDE GUERRE
    D03. ARTICLE « CONTRE DIEUDONNÉ, VALLS A RAISON »
    D04. POÈME « LA MORT DES AMANTS »
    D05. INTERVIEW DE B. TAPIE
    D06. DIALOGUE ENTRE D. COHN BENDIT ET J.-L. MÉLENCHON
    D07. FABLE « LE CHAT ET UN VIEUX RAT »
    D08. PORTRAIT DE J. GRECO
    D09. CONTRIBUTION DE L’ANTHROPOLOGUE FR. HÉRITIER
    D10. TWEET DU PRÉSIDENT E. MACRON
    D11. ARTICLE « C’ÉTAIT QUAND, LA “DERNIÈRE CHANCE” ? »
    D12. ROMAN LE PÈRE GORIOT
    D13. SPOT TÉLÉVISÉ « LA CAROTTE DÉMOTIVÉE »
    D14. PIÈCE LE MISANTHROPE

  • Continents manuscrits, n˚ 23, « Senghor : genèse, héritage, actualité »

    Continents manuscrits, n˚ 23, « Senghor : genèse, héritage, actualité »
    direction Edoardo Cagnan et Claire Riffard
    2024
    Accès libre sur : https://journals.openedition.org/coma/11359

    Continents manuscrits, n˚ 23, « Senghor : genèse, héritage, actualité » (dir. Edoardo Cagnan et Claire Riffard), 2024

    Qu’il s’agisse de l’encenser ou de le discréditer, Léopold Sédar Senghor (1906-2001) reste l’un des auteurs francophones les plus étudiés. Un groupe de recherche international, rattaché à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar et à l’Institut des textes et manuscrits modernes (ENS/CNRS) à Paris, a été créé pour donner une nouvelle impulsion aux études senghoriennes. Il s’agit de partir des archives pour renouveler les approches : brouillons poétiques, carnets, correspondances, versions préoriginales… Mais constituer et consulter les archives de Senghor ne signifie pas ériger un mausolée de papier à la gloire du poète-président : il s’agit plutôt de remonter la source pour outiller le regard critique du chercheur.

    Le numéro 23 de Continents manuscrits, « Senghor : genèse, héritage, actualité », est un jalon important des travaux du groupe de recherche. La section « Genèse » rassemble onze articles, issus des communications présentées lors de la journée d’étude Léopold Sédar Senghor : genèse d’une œuvre, qui s’est déroulée à la BnF-Richelieu le 27 juin 2024. Intitulée « Héritage », la deuxième section propose cinq entretiens : le premier reprend un entretien de Senghor portant sur la poésie et la francophonie, réalisé par Serge Bourjea et paru dans Notre librairie en 1985, tandis que dans les quatre autres entretiens des personnalités contemporaines (J.-G. Bosio, Sylvie Kandé, Nimrod et Elgas) partagent des souvenirs et rendent compte de leur rapport à l’œuvre de Senghor. Enfin, dans la section « Actualité », des spécialistes rendent compte d’ouvrages parus depuis 2020 sur la vie et l’œuvre poétique et politique de Senghor.

    Sommaire du numéro

    Edoardo Cagnan et Claire Riffard, « Genèse, héritage et actualité de Senghor : Présentation du dossier » (texte intégral)

    Genèse

    Guillaume Delaunay, « Comme les lamantins, les archivistes remontent à la source » (texte intégral)

    Susanne Gehrmann, « La genèse des traductions allemandes de Senghor au prisme des archives berlinoises » (texte intégral)

    Élise Nottet-Chedeville, « De quelques poèmes soi-disant perdus : naissance du rhapsode senghorien » (texte intégral)

    Serge Meitinger, « Le “Cahier de Verson” dans la genèse des Chants pour Naëtt puis des “Chants pour Signare” » (texte intégral)

    Mamadou Ba et Claire Riffard, « Étude génétique d’“Élégie pour la reine de Saba” : “striquant et modulant le cantique de joie” » (texte intégral)

    Alioune Diaw, « “Épitaphe” de Senghor : genèse et significations d’un poème inédit » (texte intégral)

    Edoardo Cagnan, « L’emploi rythmique des connecteurs : entre expressivité et positionnement » (texte intégral)

    Dominique Combe, « L’universalisme de Senghor : Négritude et “Civilisation de l’Universel” » (texte intégral)

    Guy Dugas, « Négritude, Négrité, Judéité, Lusitanité : correspondances croisées de Senghor avec Albert Memmi et Armand Guibert » (texte intégral)

    Giuseppe Sofo, « Une étude génétique des traductions allemandes de Senghor au prisme des archives berlinoises » (texte intégral)

    Serge Bourjea, « Glissant/Senghor : “Consentir à l’autre” : critique de la “voie africaine” de l’universel chez L. S. Senghor » (texte intégral)

    Héritage

    Léopold Sédar Senghor et Serge Bourjea, « Poésie et francophonie : entretien avec Léopold Sédar Senghor » (texte intégral)

    Jean-Gérard Bosio, Coline Desportes et Claire Riffard, « Senghor et les “glacis intérieurs” : entretien avec Jean-Gérard Bosio » (texte intégral)

    Sylvie Kandé et Violaine François, « Constituer l’archive dont il fallait me débarrasser : entretien avec Sylvie Kandé » (texte intégral)

    Nimrod et Claire Riffard, « Le poème sera toujours la genèse du monde : entretien avec Nimrod » (texte intégral)

    Elgas et Elara Bertho, « Une ombre qui veille : entretien avec Elgas » (texte intégral)

    Actualité

    Mouhamadou Moustapha Sow, « Jean-Pierre Langellier, Léopold Sédar Senghor, Paris, Perrin, 2021, 444 p. » (texte intégral)

    Edoardo Cagnan, « Elara Bertho, Senghor, Paris, PUF, coll. “Biographies”, 2023, 170 p. » (texte intégral)

    Maëlle Gélin, « Sébastien Heiniger, Décolonisation, fédéralisme et poésie chez Léopold Sédar Senghor, Paris, Classiques Garnier, coll. “Études de littérature des xxᵉ et xxiᵉ siècles”, 2022, 458 p. » (texte intégral)

    Mamadou Ba, « Augustin Ndione, La Poésie de L. S. Senghor et le lexique biblique : analyse lexicologique et sémantique appliquée aux “Élégies majeures”, Paris, L’Harmattan, 2022, 148 p. » (texte intégral)

    Denis Assane Diouf, « Waly Latsouck Faye, Comprendre Senghor, Éthiopiques : une thèse poétique de la négritude, Dakar, L’Harmattan Sénégal, t. 2, 2020, 481 p. » (texte intégral)

    Laura Gauthier Blasi, « Études littéraires africaines, nᵒ 56, ”Relire Senghor”, dir. Elara Bertho et Étienne Smith, 2023 » (texte intégral)

    Céline Labrune Badiane, « Florian Bobin, Cette si longue quête. Vie et mort d’Omar Blondin Diop, Dakar, Jimsaan, coll. ”Récits”, 2024, 286 p. » (texte intégral)

    Ana Carolina Coppola, « Senghor et les arts : réinventer l’universel : Exposition au musée du quai Branly, Paris, du 7 février au 19 novembre 2023 » (texte intégral)

  • Colloque international « Ambigüité / ambivalence (syntaxique, sémantique ou énonciative) en linguistique »

    Lieu : Université de Toulon
    Date : les 27 et 28 novembre 2025

    Date de levée : 15 janvier 2025

    Site du colloque : https://ambiguity-tln.sciencesconf.org/resource/page/id/1

    Télécharger l’appel à communications (PDF)

    Appel à communications colloque de linguistique organisé à l’Université de Toulon les 27 et 28 novembre 2025.

    Avec le soutien du laboratoire Babel (EA 2649) de l’Université de Toulon et de l’Association des Linguistes Anglicistes de l’Enseignement Supérieur (ALAES).

    Ambigüité / ambivalence (syntaxique, sémantique ou énonciative) en linguistique

    L’ambigüité est un concept productif en linguistique, et ferait même « partie intégrante du modèle » selon A. Culioli ([1973] 1999 : 48). Ce terme, utilisé aussi dans le langage courant et la vie quotidienne, correspond à une « intuition fondamentale [selon laquelle] quelque chose de double se dissimule sous une apparence d’unicité » (Le Goffic, 1982 : 83 – 84). Si la polysémie de certains morphèmes lexicaux ou grammaticaux engendre facilement l’ambigüité (« le secrétaire est dans le bureau », exemple emprunté à Dubois et al. 1999 : 31), cette dernière peut également se situer au niveau de la proposition et, partant, de la phrase, lorsqu’un agencement de marqueurs se prête à plusieurs interprétations : l’ambigüité syntaxique se double dès lors d’une ambigüité sémantique.

    Néanmoins, la plupart du temps, le recours à un contexte plus fourni, ou bien l’examen plus approfondi d’autres marques grammaticales ou énonciatives présentes dans l’énoncé permettent de lever l’ambigüité. En effet, de tels phénomènes engagent crucialement le rapport entre les formes linguistiques et le co(n)texte, qu’il revient au linguiste d’analyser.

    Il existe toutefois des cas dans lesquels il n’est pas possible de désambigüiser, et d’opter

    avec certitude pour une catégorie plutôt qu’une autre, dans la mesure où les indices syntaxiques ne sont pas assez parlants ou donnent des résultats contradictoires, tandis que le recours au contexte n’est pas suffisant pour éliminer l’ambigüité. Or, les linguistes ont souvent été inspirés par ces phénomènes inclassables : on pense à la « théorie du reste » de Jean-Jacques Lecercle. Il peut aussi être question, en se fondant sur une métaphore biologique, d’exemples de phénomènes « hybrides » (cf. Guillaume 2014). P. Le Goffic (1982) a pour sa part recours au concept d’« ambivalence », terme à l’origine utilisé en psychanalyse pour qualifier des états psychiques contradictoires. Pour Catherine Fuchs (1995), l’ambivalence est une forme de transgression ne pouvant se produire qu’en discours, à la différence de l’ambigüité, qui serait propre à la langue. On retrouve dans « ambivalence » la même racine latine ambo signifiant « (les) deux à la fois » (CNRTL) que dans « ambigüité », mais il semble toutefois que l’on va plus loin dans la complexité, avec des phénomènes plus hétérogènes et non réductibles à une seule signification. Dérive inévitable de l’indétermination de la langue ou produit de la stratégie discursive du locuteur, des « zones troubles » (Le Goffic 1982 : 83) sont ainsi générées, qu’il incombe à l’interlocuteur de démêler. Face à un idéal de non-équivocité, l’ambivalence comme l’ambigüité peuvent ainsi représenter un danger. Le risque accru de malentendus nous invite alors à nous questionner sur la dimension éthique de l’utilisation de ces formes duplices.

    Michel Ballard (1990 :153) avance « [qu’]à première vue, […] l’ambigüité [es]t un problème qui passionne davantage les linguistes, les stylisticiens ou les philosophes que les traductologues. » Une approche traductologique de l’ambigüité et/ou de l’ambivalence n’est pourtant pas à exclure. Face à l’ambigüité, il est nécessaire pour le traducteur de faire des choix. Lorsqu’elle est intentionnelle, l’ambigüité doit être conservée. À l’inverse, les cas d’ambigüités fortuites se doivent d’être levés (Rydning 1998). Par ailleurs, en traduction automatique, les outils actuels, de plus en plus performants, réussissent généralement à éviter les cas d’ambigüité. Cependant, l’étape de relecture et de post-édition reste le plus souvent indispensable.

    Sans exclure des approches essentiellement théoriques, ce colloque entend soumettre les concepts d’ambivalence et d’ambigüité à l’épreuve des corpus afin d’en évaluer la portée et les limites en contexte. Par conséquent, il s’agira d’appréhender les cas de dualité interprétative au sein de corpus d’étude variés, oraux ou écrits. Ceux-ci pourront être de nature diverse – publicité, littérature, discours politique, presse, communication médiée par ordinateur, données lexicographiques, etc. –, permettant ainsi une exploration étendue et transversale de ces phénomènes. Les langues à privilégier seront le français, l’anglais et l’espagnol, mais d’autres langues et d’autres familles de langues que celles-ci peuvent également être convoquées.

    Les propositions pourront s’articuler, de manière indicative et non limitative, autour des divers axes évoqués dans cet appel, notamment :

    • définitions et effets de l’ambigüité et de l’ambivalence, rôle de la polysémie et du contexte ; dans quels cas les relations entre valeur d’un morphème et contexte permettent- elles de définir les conditions favorables à une interprétation en termes d’ambivalence ?
    • le vague référentiel est-il nécessairement ambigu ? par exemple, en ce qui concerne les problèmes de délimitation du référent (pronom de première personne du pluriel en français – cf. Monte 2022 -, omission du pronom personnel sujet en espagnol…).
    • quels sont les effets possibles du dédoublement d’interprétations d’un même énoncé, pouvant être compatibles et finissant par s’amalgamer, ou bien se révélant incompatibles, mais dans le même temps impossibles à départager ?
    • sur le plan énonciatif, dans le champ du discours représenté, à quelles conditions les formes complexes de représentation du discours autre (Authiez-Revuz 2020) sont-elles source d’ambigüité ? L’on ne sait dans certains cas qui parle, et les attributions à deux sources énonciatives différentes sont parfois incompatibles, et parfois ambivalentes – la superposition des voix ou points de vue portés par les énoncés représentés faisant alors partie des ressources déployées par le locuteur/énonciateur premier (Germoni et Stolz 2019). Et que devient alors, dans la structure narrative globale, la répartition entre narration, dialogues et pensées ?
    • en traduction, est-il toujours possible d’évaluer le caractère intentionnel ou fortuit de l’ambigüité ? Quelle(s) incidence(s) la conservation ou non de l’ambigüité et/ou de l’ambivalence peuvent-elles avoir ? La question de cas intraduisibles ou d’échecs de traduction pourra également être étudiée.

    Modalités de soumission et calendrier :

    • proposition de communication anonyme (une à deux pages maximum, comportant le titre de la communication, un résumé, quelques références bibliographiques) à envoyer avant le 15 janvier 2025 en format Word et / ou pdf à l’adresse suivante :
      ambiguity-tln@sciencesconf.org
      Merci d’indiquer clairement le nom et l’affiliation de l’auteur ou des auteurs dans le corps du courriel.
    • réponse aux auteurs : au plus tard le 30 mars 2025
    • 27 et 28 novembre 2025 : colloque à l’Université de Toulon

    Comité d’organisation / Comité scientifique

    Comité organisateur

    Bénédicte Guillaume, Élise Mathurin, Michèle Monte, Vanessa Saint-Martin
    Université de Toulon

    Comité scientifique

    • Audrey Coussy (McGill University)
    • Barbara Dancygier (University of British Columbia)
    • Antin Fougner Rydning (Universitetet i Oslo)
    • Laure Gardelle (Université Grenoble-Alpes)
    • María Isabel González-Rey (Universidad de Santiago de Compostela)
    • Michelle Lecolle (Sorbonne Nouvelle)
    • Laëtitia Leonarduzzi (Université d’Aix-Marseille)
    • Natalia López-Cortés (Universidad de Zaragoza)
    • Blandine Pennec (Université Toulouse II – Jean Jaurès)
    • Myriam Ponge (Université Paris 8)
    • Fabio Reggatin (Università degli Studi di Udine)
    • Corinne Rossari (Université de Neuchâtel)
    • Pascale Roux (Université Lumière Lyon 2)
    • Mohamed Saki (Université de Bretagne Occidentale)
    • Martine Sekali (Université de Nanterre)
    • Denis Vigier (Université Lumière Lyon 2)
    • Esme Winter-Froemel (Universität Würtzburg)
  • Le poème en 1924. Aux marges du surréalisme

    Études littéraires, vol. 53, 1 / 2023
    sous la direction de Arnaud Bernadet

    https://www.etudes-litteraires.ulaval.ca
    Le poème en 1924. Aux marges du surréalisme

    Si l’année 1924 est reconnue comme un moment charnière dans la poésie d’expression française, notamment à cause de la publication du Manifeste du surréalisme d’André Breton, elle marque également l’essor de plusieurs auteurs laissés en marge de l’histoire littéraire, restés dans l’ombre du courant surréaliste.
    Ce numéro d’Études littéraires tient donc à revisiter cette année, à redonner à ces écrivains, qui ne sont pas pour autant « d’arrière-garde » ou « antimodernes », leur juste place et à rendre compte du formidable foisonnement de l’époque. Car la modernité du poème qui occupe cette période est effectivement plurielle : elle peut autant user de la révolution que se cantonner à l’évolution. Elle ne se limite pas non plus au centre parisien, et peut également trouver naissance dans la migration et le voyage.
    Au sein même du groupe surréaliste, les visions sont multiples – le groupe refusera d’ailleurs de figurer dans l’Anthologie de la nouvelle poésie française, elle-même dirigée par des surréalistes –, laissant Antonin Artaud « aux confins de l’avant-garde ». Ce dernier n’est pas le seul à préférer les marges aux théories surréalistes : Tristan Tzara répliquera au Manifeste de 1924 par la publication des Sept manifestes dada et Blaise Cendrars refusera de limiter la poésie à une « école exclusive ».
    Ce sont donc les œuvres et les visions, de Cendrars, Tzara et Artaud, en plus de celles de Marcel Thiry, Saint-John Perse, Marcel Mauss, Alfredo Gangotena et Jules Supervielle – tous ayant eu un rôle à jouer dans la modernité de la poésie – qui sont au centre de ce numéro qui montre la richesse véritable de l’année 1924.

    Sommaire

    Arnaud Bernadet
    Voix oubliées, voix décentrées. Lire le poème en 1924 7

    ÉTUDES

    Anne Reverseau
    Anthologie de la nouvelle poésie française de Kra. Défense et illustration de la diversité formelle de la modernité 25

    Alexander Dickow
    Un reliquaire : les Sept Manifestes dada de 1924 41

    Olivier Penot-Lacassagne
    Aux confins du surréalisme, Antonin Artaud… 61

    Claude Leroy
    Spirale de 1924 chez Blaise Cendrars 75

    Bertrand Degott
    Toi qui pâlis au nom de Vancouver de Marcel Thiry: trop pâli pour être moderne ? trop dépoli pour ne pas l’être ? 91

    Nelson Charest
    Pour fêter un contre-don : Mauss et Saint-John Perse 109

    Émilien Sermier
    Le vers au grand large. De Gangotena à Supervielle 123

    Sophie Fischbach
    Poésie et profondeurs : « Toucher violemment le fond des choses ». Les « Poèmes de Guanamiru » (Gravitations) de Jules Supervielle 139

    ANALYSES

    Fatima Zohra Rghioui, Cassandre Heyraud et Camilo Balaguera Fonctions de l’énonciation poétique dans Mahmoud ou la montée des eaux (2021) d’Antoine Wauters 159

    Ismaïl El Jabri, Marie Schaeverbeke et Joana Thanasi
    Voix et énonciation dans Le Musée des contradictions d’Antoine Wauters 175

    Desiré Calanni Rindina
    Modernisme et crise de la représentation dans Aveux non avenus 189

    Claude Tuduri
    L’art de l’amitié chez Montaigne : une pratique poétique, sociale
    et utopique de l’écriture 211

    Notices sur les collaborateurs et collaboratrices

    Résumés / Abstracts

    Feuilleter la présentation

  • Technologies d’écriture de l’empathie

    Date de tombée (deadline) : 31 Décembre 2024
    À : Konstanz

    Responsable :
    Gesine Hindemith, Mailyn Lübke, Selina Seibel
    Url de référence :
    https://www.romanistiktag.de/xxxix-romanistiktag/sektionen/sektion-20/

    Section transversale (linguistique et littérature) lors de la 39e journée de la romanistique
    « Constance et changement. Romanistique et nouvelles technologies » en septembre 2025
    Technologies d’écriture de l’empathie

    Dr Gesine Hindemith (Université de Stuttgart),

    Dr Mailyn Lübke (Université d’Osnabrück),

    Selina Seibel (Université de Stuttgart)

    La réalité de la vie d’aujourd’hui est celle d’une cohabitation numérique et humaine, dans laquelle les échanges passent souvent par les technologies d’écriture (Internet, terminaux mobiles, services de messagerie). Le paradigme de la communication médiatisée par ordinateur modifie les relations interpersonnelles, dont le fondement empathique ne se déroule plus seulement en face-à-face, mais doit être renégociée par le biais des technologies d’écriture numériques. La section comprend l’empathie comme une condition préalable aux processus du langage qui génèrent et représentent des prestations de compréhension et d’empathie. L’empathie recèle donc un potentiel de compréhension de texte. Pour l’ère numérique, l’empathie doit être repensée ‹ dans la tentative de combler l’espace intermédiaire entre les individus par des techniques médiatiques ou, à l’inverse, de ne créer la différence entre eux que par une mise en relation médiatique › (Breger/Breithaupt 2010 : 7). Comment l’empathie peut-elle se ressentir dans les technologies d’écriture ? D’autant plus que la question se pose à nouveau lorsque les IA deviennent des interacteurs capables de représenter l’empathie et de la rendre ainsi recevable (Misselhorn 2021). Les structures de la formation linguistique / langagière de l’empathie peuvent ainsi être étudiées. La section a pour but d’aborder pour la première fois les paramètres modifiés de la communication par les technologies d’écriture pour la cohabitation humaine et numérique, d’un point de vue linguistique et littéraire.

    Les formes de communication générées par le numérique ont récemment fait leur entrée dans la littérature romanesque contemporaine. On peut citer les romans par e-mail d’auteurs comme Virginie Despentes (Cher connard 2022) et Eric-Emmanuel Schmitt (L’elixir d’amour 2015). Les technologies d’écriture numérique sont reprises comme formes narratives constitutives ou paratextes (Éliette Abécassis : Instagrammable 2021, Milica Marinkovic : Piacere, Amelia 2016, José Luis Palma : El amor en los tiempos del chat 2013). Les plateformes de médias sociaux conduisent à un élargissement de la pratique de publication littéraire dans le domaine numérique, par exemple sur le compte Instagram Amour solitaires de Morgane Ortin, qui y littérarise des conversations en ligne. Les auteurs utilisent de plus en plus souvent l’IA dans les processus d’écriture et les premiers textes littéraires entièrement rédigés par l’IA voient le jour (Antonio Addati et IA, Memorie di un I.A. 2023). 

    Le lien entre la technique et la communication peut être observé comme une constante diachronique. Dans la perspective de l’histoire de la littérature et de la langue, il est possible de comparer les technologies d’écriture numérique avec des formes historiques (roman épistolaire du 18e siècle, formes de dialogue dans les œuvres de fiction à partir de la Renaissance). On observe ici le déplacement et l’hybridation de l’oralité et de la littéralité. A partir de la situation numérique-humaine, les questions relatives au rapport entre oralité et écriture, entre corps et technologie d’écriture, à la présence et à l’absence, à la création ou à la simulation d’empathie se posent à nouveau en termes de constance et de changement des paramètres.

    Les phénomènes de la communication numérique sont maintenant pris en compte dans le domaine linguistique (en particulier la pragmatique). Ainsi, les corpus de conversations en ligne ou les fils de discussion des médias sociaux sont de plus en plus étudiés du point de vue de leurs phénomènes et fonctions linguistiques (cf. Dürscheid/Frick 2016) et peuvent donc également être examinés du point de vue d’éventuels marqueurs d’empathie. Dans la perspective de la linguistique pragmatique et interactionnelle, on peut prendre en compte des corpus diachroniques et numériques qui contiennent du matériel sur la description et la ou les fonctions des pratiques d’écriture pour la production de représentations d’empathie textualisées de manière analogique et numérique. Ces dernières peuvent être réalisées par exemple par des objets sonores, des stratégies d’intensification et d’atténuation, des références déictiques, des processus de réparation et des auto-révélations.

    Dans le cadre de l’ « emotional turn » au tournant du millénaire, l’empathie est devenue un concept discuté, même s’il n’a pas encore été clairement défini, dans différentes disciplines (sciences cognitives, neuropsychologie, philosophie, didactique, etc.) Les premières connaissances sur la description des représentations de l’empathie d’un point de vue linguistique se réfèrent principalement à l’analyse de données allemandes (Pfänder/Gülich 2013 ; Kupetz 2015, 2020 ; Jacob/Konerding/Liebert 2020 ; Bauer 2024). Des approches visant à développer l’empathie pour la recherche narratologique existent dans les études anglophones et germanophones (Keen 2010 ; Anz 2007).

    La communication sera également abordée sous l’angle de la littérature et de la linguistique, par exemple en ce qui concerne la structuration temporelle, psychologique et séquentielle en séquences d’événements (Watzlawick 2007), en analysant la compréhension intersubjective des actions linguistiques au sein d’une conversation. Les technologies d’écriture ont une influence directe sur le déroulement d’une telle communication et influencent le choix des techniques d’émotionnalisation.

    Le projet de section part de l’hypothèse que les processus de formation de l’empathie sont structurés de manière narrative et séquentielle. L’objectif de la section transversale est d’étudier via diverses perspectives les constantes et les changements de la communication médiatico-technologique sous le signe de l’empathie. Les littératures et les langues de la Romania constituent un domaine d’étude qui offre des points de comparaison historiques, socioculturels et linguistiques : des technologies d’écriture analogiques à la communication en ligne de l’âge numérique. La section est ouverte à toutes les langues et littératures romanes.

    Questions possibles

    •     Quelles sont les fonctions des technologies d’écriture dans les processus de création d’empathie en littérature et dans la communication médiatisée par ordinateur ?

    •     Quelles méthodes peuvent être développées pour analyser les marqueurs d’empathie d’un point de vue linguistique et littéraire ?

    •     Quelles structures conceptuelles-orales et quelles pratiques socioculturelles peuvent être analysées dans les représentations écrites de l’empathie ?

    •     Comment peut-on, par le biais d’une comparaison entre l’histoire de la littérature et celle de la langue, tirer des conclusions sur les changements actuels de la communication dans la cohabitation entre l’homme et le numérique ? 

    •     Quel rôle jouent l’IA et les formes de communication générées par le numérique dans la production littéraire actuelle ? Comment les représentations de l’empathie s’y reflètent-elles ? Comment peut-on appréhender cela d’un point de vue narratologique ?

    •     Quelle est l’influence de l’ère numérique sur le langage dans une perspective littéraire et linguistique ? Quelles conséquences méthodologiques en découlent pour les pratiques d’analyse des deux disciplines ?


    Nous sommes heureux de recevoir des propositions de présentation pour notre section ! Pour cela, envoyez un exposé par e-mail à : 

    schreibtechnologien2025@outlook.de

     L’exposé doit contenir votre/vos nom(s) et affiliation(s) ainsi que le titre de votre communication et il peut comporter au maximum 4000 caractères, espaces et données bibliographiques et autres compris. La date limite de soumission d’un exposé est fixée au 31 décembre 2024. L’acceptation définitive interviendra au plus tard le 31 janvier 2025. 


    Bibliographie sélective

    Anz, Thomas: „Kulturtechniken der Emotionalisierung. Beobachtungen, Reflexionen und Vorschläge zur literaturwissenschaftlichen Gefühlsforschung“. In: Eibl, Karl; Mellmann, Katja; Zyrner, Rüdiger (Hg.): Im Rücken der Kulturen. Paderborn 2007.

    Bauer, Nathalie: „Empathiedarstellungen und Normalisierung – Metapositionierungen mit ‚natürlich‘ und ‚klar‘ in onkologischen Aufklärungsgesprächen“. In: Bauer, Nathalie; Günthner, Susanne; Schopf, Juliane: Die kommunikative Konstruktion von Normalitäten in der Medizin: Gesprächsanalytische Perspektiven. Berlin/Boston 2024, 131-156.

    Breger, Claudia; Breithaupt, Fritz: Empathie und Erzählung. Freiburg 2010.

    Bustos Tovar, Jesús José de: „Lengua común y lengua del personaje en la transición del siglo XV al XVI“. In: Vian Herrero, Ana; Baranda Leturio, Consolación: El personaje literario y su lengua en el siglo XVI. Madrid 2006, 13-40.

    Drescher, Martina: Sprachliche Affektivität. Darstellung emotionaler Beteiligung am Beispiel von Gesprächen aus dem Französischen. Tübingen 2003.

    Dürscheid, Christa; Frick, Karina: Schreiben digital. Wie das Internet unsere Alltagskommunikation verändert. Stuttgart 2016.

    Gnach, Aleksandra; Weber, Wibke; Engebretsen, Martin; Perrin, Daniel: Digital Communication and Media Linguistics. Cambridge 2023.

    Heßler Martina (Hg.): Technikemotionen. Paderborn 2020.

    Jacob, Katharina; Konerding, Klaus-Peter; Liebert, Wolf-Andreas (Hg.): Sprache und Empathie. Berlin/Boston 2020.

    Keen, Suzanne: Empathy and the Novel. New York 2007.

    Koch, Peter; Oesterreicher, Wulf: „Sprache der Nähe – Sprache der Distanz. Mündlichkeit und Schriftlichkeit im Spannungsfeld von Sprachtheorie und Sprachgeschichte“. In: Deutschmann, Olaf et al. (Hg.): Romanistisches Jahrbuch. Berlin/New York 1985, 15-43.

    Koschorke, Albrecht: Körperströme und Schriftverkehr. Mediologie des 18. Jahrhunderts. München 2003.

    Kupetz, Maxi: Empathie im Gespräch. Eine interaktionslinguistische Perspektive. Tübingen 2015.

    —    : „Sprachliche, interaktionale und kulturelle Aspekte von Empathie in sozialer Interaktion“, in: Jacob, Katharina; Konerding, Klaus-Peter; Liebert, Wolf-Andreas (Hg.) Sprache und Empathie. Berlin/Boston 2020, 141–173.

    Malinowska, Anna; Gratzke, Michael: The Materiality of Love. Essays on Affection and Cultural Practice. London 2018.

    Misselhorn, Catrin: Künstliche Intelligenz und Empathie. Von Leben mit Emotionserkennung, Sexrobotern & Co. Stuttgart 2021.

    Nabi, Robin L.; Myrick, Jessica Gall (Hg.): Emotions in the Digital World. Exploring affective experience and expression in online interactions. New York 2023.

    Ortner, Heike: Text und Emotion. Theorie, Methode und Anwendungsbeispiele emotionslinguistischer Textanalyse. Tübingen 2014.

    Pfänder, Stefan; Gülich, Elisabeth: „Zur interaktiven Konstitution von Empathie im Gesprächsverlauf. Ein Beitrag aus Sicht der linguistischen Gesprächsforschung“. In: Breyer, Thiemo (Hg.): Grenzen der Empathie. Philosophische, psychologische und anthropologische Perspektiven. München 2013, 433–457.

    Stauf, Renate; Simonis, Annette; Paulus, Jörg (Hg.): Der Liebesbrief. Schriftkultur und Medienwechsel vom 18. Jahrhundert bis zur Gegenwart. Berlin/New York 2008.

    Watzlawick, Paul: Menschliche Kommunikation. Formen, Störungen, Paradoxien. 11. Auflage. Bern 2007.

  • « Je rends chaque coup dans la langue de Césaire ». Le texte de rap, entre poésie et récit francophones

    Date de tombée (deadline) : 20 Décembre 2024
    À : Sorbonne Université – Paris

    Responsable : Sorbonne Univ., Univ. de Bourgogne, Univ. Libre de Bruxelles
    Florian Alix – Virginie Brinker – Marion Coste – Romuald Fonkoua – Laurence Rosier

    « Je rends chaque coup dans la langue de Césaire »
    Le texte de rap, entre poésie et récit francophones

    Colloque international

    Sorbonne Université / Université de Bourgogne / Université Libre de Bruxelles

    « On me tue chaque jour dans la langue de Molière
    Je rends chaque coup dans la langue de Césaire »
    Kery James, « Le poète noir »

    Le rap est un genre musical dans lequel le texte, qui est la responsabilité du MC, est d’une importance cruciale. Très fréquemment, dans les interviews, les rappeur·euses mettent en avant leur activité d’écriture comme partie essentielle de leur art. Nous voudrions par ce colloque rendre compte des phénomènes de continuité qui peuvent exister avec les autres genres poétiques et les genres narratifs des littératures francophones, tout en nous montrant sensibles aux spécificités de l’expression rap. 

    Afin d’éviter des approches textualistes qui réduiraient le rap à ses paroles[1], nous souhaitons que la dimension performée et musicale du texte soit prise en compte.  Il nous semble en effet essentiel d’inclure dans toute réflexion sur ce genre cette dimension intermédiale[2]/transmédiale[3], et de faire porter l’analyse à la fois sur le texte, la musique, l’image et les conditions de la performance, voire l’influence des circuits de distribution et de leurs acteurs et actrices[4]. Cette hybridité médiatique du rap est d’autant plus cruciale qu’elle peut amener à le voir comme une « contre-littérature[5] », telle que Bernard Mouralis a établi le terme pour de tout autres corpus. C’est une pratique qui se fait en opposition à la littérature, parce que le rap intègre d’autres procédés d’expression et parce qu’il s’est construit sur une « illégitimité paradoxale »[6] ; mais il ne cesse d’entretenir une relation avec la littérature, soit explicitement en la citant, soit implicitement en adoptant des stratégies d’écriture qui peuvent y faire écho, soit en affirmant ostensiblement ses distances avec une certaine littérature présentée comme canonique. 

    Interroger cette relation à la littérature francophone et confronter le rap aux outils d’analyse des études francophones nous semblent ainsi à même de révéler des éléments de continuité et de rupture susceptibles d’enrichir la compréhension des spécificités d’écriture de ce genre, tout en l’inscrivant dans une histoire de la pensée qui ne s’est jamais réduite à l’objet livre. Par exemple, se pencher sur la textualité du rap demande de considérer une hybridité formelle à l’aune d’une histoire culturelle marquée du sceau du politique, toutes choses que les études francophones ont développées au fil de leur évolution. Il ne s’agit donc pas de considérer le rap comme relevant des littératures africaines, caribéennes ou maghrébines, mais d’éprouver l’analyse de la textualité du rap à l’aune de méthodologies francophones, et de voir en retour ce que cette intégration du rap apporte à ces méthodologies. 

    Plusieurs axes peuvent être envisagés : 

    1)     Le texte de rap, entre récit, poésie et arts de la scène. La forme courte du texte de rap ainsi que sa réalisation orale invitent de prime abord à classer le rap dans le genre poétique, ce qui a pour intérêt de souligner la façon dont les textes de rap travaillent les rythmes des mots et leurs potentialités évocatrices. La trap par exemple propose souvent des textes sans continuité thématique évidente, dans lesquels la rupture syntaxique et thématique met en valeur la capacité d’évocation des termes[7]. Nous espérons des communications qui porteront sur les spécificités poétiques des textes de rap. Pourtant, force est de constater que les textes de rap construisent aussi des récits. Ainsi, la réflexion pourrait concerner la pratique du storytelling dans des albums (JVLIVS de SCH, L’Etrange histoire de Mr. Anderson de Laylow, Lipopette Bar d’Oxmo Puccino, pour ne citer que quelques exemples) ou des morceaux (J’pète les plombs de Disiz, Petit Frère d’IAM, la série des « Enfants du destin » de Médine), pour étudier la façon dont ces formes construisent le récit. Sans chercher à catégoriser les textes de rap, il s’agira de se montrer sensible aux dimensions poétiques et narratives des textes et à leur entremêlement. L’importance des performances scéniques invite aussi à penser l’influence des arts de la scène sur l’écriture, qui pourrait faire l’objet de communication. L’influence de l’évolution des pratiques d’écoute et des supports de diffusion, de la radio aux CD au streaming, sur les pratiques du texte pourrait aussi faire l’objet de communications. On pourrait également réfléchir à divers emprunts à l’esthétique rap, que l’on peut trouver dans des romans, des pièces de théâtre, des arts séquentiels… 

    2)     Le texte de rap comme pratique intermédiale. Dans la continuité des travaux sur la place de l’oralité dans les poésies francophones, il pourra s’agir d’étudier la façon dont le texte performé de rap joue de cette oralisation pour produire des formes textuelles nouvelles. On pourra ainsi s’intéresser à des morceaux dans lesquels le texte tient a priori une place minime, se réduisant à l’évocation disparate de thèmes et faisant la part belle aux répétitions, pour voir comment l’intérêt du texte peut tenir dans son oralisation et dans sa mise en musique, voire dans sa possible dramatisation[8]. On appréciera particulièrement les communications inscrivant ces pratiques de l’oralité dans la continuité d’autres pratiques poétiques francophones, ou en opposition avec elles. 

    3)     Les références du texte de rap. L’inscription du rap dans les poétiques francophones tient aussi aux choix des références : les travaux de Virginie Brinker ont d’ores et déjà montré la façon dont certains rappeurs et rappeuses citent les penseurs des études francophones[9], et Bettina Ghio a révélé la place de la culture littéraire scolaire dans les textes de rap[10]. Reste à étudier la façon dont le texte de rap construit des systèmes de références piochant dans divers domaines des cultures populaires, films, séries, sports, pour construire des identités francophones ouvertes à des influences mondialisées. Il ne s’agit sans doute pas uniquement de chercher une légitimité littéraire qui se ferait par clins d’œil – geste susceptible de reconduire une hiérarchisation des genres que nous souhaitons éviter – que de déplacer les références en les reconfigurant. On pourrait ainsi interroger la place des mémoires afro-descendantes et des cultures afro-américaines par l’étude des références choisies par les rappeurs et rappeuses et lire ce phénomène comme l’ouverture d’un « cosmopolitisme vernaculaire[11] », selon l’expression de Homi K. Bhabha. Dans les textes de rap, on fait allusion à des poètes français en même temps qu’à Frantz Fanon, le tout sur des musiques influencées par exemple par la rumba congolaise. S’ajoutent à ce mélange des références à des productions audiovisuelles diverses, des films de Scorsese aux séries Netflix, pour étudier les passages transmédiaux auxquels se prête le rap.

    4)     Texte de rap et persona. Dans la continuité de l’étude de la dimension narrative des textes de rap, on pourrait interroger la façon dont le corps du ou de la MC est travaillé et mis en scène pour produire du récit. Il semble ainsi évident que les rappeuses et/ou les rappeur·ses queer, minoritaires dans le rap comme dans de nombreux genres musicaux, se saisissent des opportunités et des limites imposées par leur genre pour construire des persona spécifiques. De même, les différentes performances de la masculinité[12] s’inscrivent dans la création de persona variées. Et la diversification des esthétiques liées à la pratique du rap conduit aujourd’hui à une pluralité de manières d’être une rappeuse, de Casey à Shay, en passant par Chilla. On pourrait établir le même constat sur la façon dont la race, pensée comme une construction sociale, influe sur les persona produites par les artistes. De plus, ils ou elles en jouent en fonction de positionnements esthétiques, qui dépendent des sous-genres dans lesquels chacun·e cherche à s’illustrer. Ces sous-genres impliquent des thématiques et un ton spécifique et variera ainsi la persona de qui choisit la voix du rap conscient, de la trap, du troll rap, etc. Il faudrait se rendre sensible aux stratégies de l’excès, du second degré, de la farce[13], de la figure du trickster, qui appellent à une réception interprétative des morceaux. Une réflexion sur les dynamiques genrées et racialisées à l’œuvre dans l’invention esthétique de persona sera particulièrement appréciée. 


    Comité d’organisation

    • Florian Alix, CELLF/CIEF – Sorbonne Université
    • Virginie Brinker, CPTC – Université de Bourgogne
    • Marion Coste, CELLF/CIEF – Sorbonne Université
    • Romuald Fonkoua, CELLF/CIEF – Sorbonne Université
    • Laurence Rosier – Université Libre de Bruxelles

    Comité scientifique

    • Florian Alix, CELLF/CIEF – Sorbonne Université
    • Francesca Aiuti –Université degli Studi Roma tre
    • Virginie Brinker, CPTC – Université de Bourgogne
    • Marion Coste, CELLF/CIEF – Sorbonne Université
    • Romuald Fonkoua, CELLF/CIEF – Sorbonne Université
    • Anaïs Goudmand, CELLF – Sorbonne Université
    • Magali Nachtergael, Plurielles – Université Bordeaux Montaigne 
    • Laurence Rosier – Université Libre de Bruxelles
    • Serigne Seye –Université Cheikh Anta Diop
    • Cyril Vettorato, Cerilac – Université Paris Cité 

    Calendrier

    Date limite de soumission des propositions : 20 décembre 2024. 

    Les propositions, d’une limite de 300 mots, seront accompagnées d’une brève notice bio-bibliographique. Elles seront envoyées à l’adresse suivante : rapsucolloque@gmail.com

    Retour sur les propositions : début avril 2025. 

    Date du colloque : 20-21-22 novembre 2025.

    — 
    [1] Emmanuelle Carinos et Karim Hammou, « Approches du rap en français comme forme poétique », in Stéphane Hirschi, Corinne Legoy, Serge Linarès, Alexandra Saemmer et Alain Vaillant (dir.), La poésie délivrée, Nanterre, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2017, p. 269-284.
    [2] Karim Hammou, Une histoire du rap en France, Paris, La Découverte, 2012 ; Magali Nachtergael, Poet against the machine : une histoire technopolitique de la littérature, Marseille, Le Mot et le reste, 2020 ; Irina Rajewsky, « Le terme d’intermédialité en ébullition : 25 ans de débat », in Caroline Fischer (éd.), Intermédialités, Paris, SFLGC, 2015. 
    [3] Rémi Besson, « Prolégomènes pour une définition de l’intermédialité à l’époque contemporaine », 2014, HAL, https://univ-tlse2.hal.science/hal-01012325v2, consulté le 28 juin 2024. 
    [4] Keivan Djavadzadeh, Hot, cool and vicious : genre, race et sexualité dans le rap états-unien, Paris, Les Prairies ordinaires, 2021. 
    [5] Bernard Mouralis, Les Contre-littératures, Paris, Hermann, coll. « Fictions pensantes », 2011 [1975].
    [6] Karim Hammou, Une Histoire du rap en France, op.cit., p. 12. Voir aussi : Séverin Guillard et Marie Sonnette, « Légitimité et authenticité du hip-hop : rapports sociaux, espaces et temporalités de musiques en recomposition », Volume !, 17 :2, 2020 :2, p. 7-23.
    [7] Juliette Hubert, Esthétique de la rupture comme engagement, du corps au lyrisme, dans le rap et la pop urbaine depuis les années 2000, thèse en préparation, sous la direction de Stéphane Hirschi et Serge Lacasse, Université Polytechnique Hauts de France et Université Laval. 
    [8] Voir Cyril Vettorato, Un monde où l’on clashe : la joute verbale d’insulte dans la poétique de rue, Paris, Éditions des Archives contemporaines, 2018. 
    [9] Virginie Brinker, « Héritages de Césaire, Fanon et Glissant : enjeux politiques et identitaires des références », in Emmanuelle Carinos et Karim Hammou (dir.), Approches formelles des musiques hip-hop, Presses universitaires de Provence, coll. Chants Sons, 2020 ; « Rap français, vers une poéthique cosmopolite », in Guillaume Bridet, Virginie Brinker, Sarah Burnautzki et Xavier Garnier (dir.), Dynamiques actuelles des littératures africaines : panafricanisme, cosmopolitisme, afropolitanisme, Paris, Karthala, 2018, p. 259-270 ; « Actualité de la pensée de Fanon dans le rap de Casey », Mouvements, n° 96, 2018, p. 36-42.
    [10] Bettina Ghio, Sans faute de frappe : rap et littérature, Marseille, Le Mot et le reste, 2016. 
    [11] Homi K. Bhabha, Les Lieux de la culture, trad. Françoise Bouillot, Payot & Rivages, coll. « Petite biblio Payot », 2019 [1994], p. 17-22. 
    [12] Marion Dalibert, « Les masculinités ethnoracialisées des rappeur.euse.s dans la presse », Mouvements, n° 96, 2018, p. 22-28. 
    [13] Voir Cyril Vettorato, Un monde où l’on clashe : la joute verbale d’insulte dans la poétique de rue, op.cit.