Catégorie : News

  • Le Style Houellebecq ?

    Classiques GarnierActes, mélanges et collectifsRencontres n°133

    Fabienne Boissiéras, Violaine Géraud

    321 pages
    18/09/2024

    Lien vers le site de l’éditeur

    Présentation

    Destiné à ouvrir le champ des interprétations, le volume porte attention, pour la première fois, au style Houellebecq. En ayant recours à une analyse de la langue, dans ses options thématiques, lexicales, grammaticales, énonciatives et rhétoriques, on pénètre ainsi dans l’épaisseur d’un style.

  • Le style en (icono)texte : littérature et bande dessinée

    Le style en (icono)texte : littérature et bande dessinée

    16h-18h, Maison de la Recherche
    28, rue Serpente 75006 Paris

    Comité d’organisation :
    Arianna Bocca-Pignoni,  arianna.bocca[a]etu.sorbonne-universite.fr
    Clara Cini,  clara.cini[a]sorbonne-universite.fr
    Norbert Danysz,  norbert.danysz[a]univ-lyon2.fr

    Présentation

    À la suite de la journée d’étude “Penser le style des littératures écrites et dessinées : pratiques de la greffe”, qui s’est tenue à Sorbonne Université le 31 mai 2024, ce séminaire vise à poursuivre les discussions autour de l’objet style en prolongeant le dialogue esquissé entre littérature et bande dessinée. 

    Pensé en littérature comme un écart avec la norme, ou comme une illustration de celle-ci, comme l’expression d’une singularité auctoriale ou comme le reflet d’une allégeance à un courant littéraire, à un genre, voire comme le témoignage de la langue d’une époque, le concept de style s’avère aussi malléable qu’épineux pour la recherche. Prise au croisement de diverses « mystiques » selon François Rastier, à la fois inévitable, et malaisée d’approche, la notion a donné lieu à de nombreuses réflexions depuis l’œuvre fondatrice de Charles Bally instituant en France la discipline de la stylistique. En vertu de sa nature protéiforme, on reconnaît toutefois à la notion de style son adaptabilité puisqu’elle s’emploie aisément pour caractériser tous les domaines et les formes d’expressions, au-delà du seul champ littéraire. 

    Aussi, interroger le style en bande dessinée c’est se heurter aux spécificités du médium : l’hybridité iconotextuelle qui le définit et la réalité souvent collective de sa production. Dans la lignée des approches logocentrées de la bande dessinée, les études liées au style de ce médium se sont originellement concentrées sur ses récits et ses discours. Progressivement, l’intérêt croissant porté à l’esthétique de la bande dessinée a conduit à mener des études stylistiques de ses images, en tentant de dégager des filiations artistiques dans ce qui est considéré non plus seulement comme un médium mais bien comme un neuvième art. Réévaluer la dimension picturale de la bande dessinée amène à s’interroger sur la qualité des images valant pour elles-mêmes, au-delà de leur rôle seulement narratif, en mettant au centre de la préoccupation esthétique la notion de graphiation. Cependant, ces travaux n’en restent pas moins sporadiques et les récentes études font, en tentant de le combler, le constat d’un manque critique important.

    Ce séminaire prend donc le parti de mettre en regard des approches variées, opposées ou complémentaires du style. Tout en s’abstenant de considérer le médium de la bande dessinée comme un simple genre dérivé de la littérature, il s’agira d’envisager, en parallèle ou dans un même geste, des productions pouvant relever de ces deux champs contigus : le roman, la nouvelle, le poème, la micro-fiction, aussi bien que les genres de l’autobiographie au sens large, dans l’album, la planche, le strip voire le cartoon.

    Chaque séance sera l’occasion d’exposer, de confronter ou de réconcilier des approches diverses de la notion de style, notion plastique qui s’avère d’autant plus malléable dès lors qu’on l’applique tour à tour à des corpus textuels ou iconotextuels. Il s’agira ainsi de faire dialoguer deux chercheur·euses spécialistes, l’un·e de littérature écrite, l’autre de bande dessinée, au fil de six rencontres. 

    Programme

    Vendredi 11 octobre 2024 | 16h-18h (salle D223)
    Représentations médiévales et constructions stylistiques
    Anna Denis (Université Paris-Est Créteil)
    Astrée Ruciak (Sorbonne Université)

    Vendredi 6 décembre 2024 | 16h-18h (salle D223)
    Style des auteurs, style des œuvres ?
    Stéphane Bikialo (Université de Poitiers)
    David Pinho Barros (Université de Porto)

    Vendredi 24 janvier 2025 | 16h-18h (D513, Salle 18)
    Principes, survivances et modernités
    Anthony Rageul (Université de Reims Champagne-Ardenne)
    Bernard Vouilloux (Sorbonne Université)

    Vendredi 28 février 2025 | 16h-18h (salle D223)
    Mémoires et trajectoires
    Benoît Crucifix (KU Leuven et Royal Library of Belgium)
    Laélia Véron (Université d’Orléans)

    Vendredi 25 avril 2025 | 16h-18h (salle D223)
    Variations graphiques et textuelles
    Clara Cini (Sorbonne Université)
    Philippe Marion (UCLouvain)

    Vendredi 6 juin 2025 | 16h-18h (salle D223)
    Expressivité de l’(icono)texte
    Éric Bordas (ENS de Lyon)
    Jacques Dürrenmatt (Sorbonne Université)

    Informations pratiques

    Lieu

    Maison de la Recherche de Sorbonne Université
    28 rue Serpente
    75005 Paris

    Inscription obligatoire aux adresses suivantes :

    • arianna.bocca[a]etu.sorbonne-universite.fr
    • clara.cini[a]sorbonne-universite.fr
    • norbert.danysz[a]univ-lyon2.fr
  • Sens et senteurs

    L’olfaction dans la littérature et la communication

    Présentation

    L’odorat est certes moins développé chez l’homme que la vue ou l’audition qui nous permettent de nous orienter dans l’espace. C’est pourquoi les sciences humaines ont jusqu’alors privilégié l’étude d’autres sens. Il est certes plus difficile de verbaliser une émotion à partir d’une odeur mais l’homme est en capacité d’en sentir des milliers et de les intérioriser avec une forte coloration affective : le « discours olfactif » lui permet donc d’exprimer son rapport au monde – adaptation ou aliénation – selon sa situation de communication. À la croisée des approches littéraire et info-communicationnelle, les travaux interdisciplinaires réunis dans cet ouvrage consistent à décrypter une rhétorique des senteurs. Dès lors, l’olfaction apparaît indispensable à la construction du sens et s’avère, enfin, un marqueur social équivoque.

  • Initiation à la stylistique

    Initiation à la stylistique – 3e édition revue et enrichie
    Éditions Ellipses
    Claire Stolz

    Parution : 01.10.2024
    Pages : 272 pages
    Format : 14,5 cm x 21 cm
    ISBN :  9782340096127

    Description

    La stylistique connaît un formidable regain d’intérêt et est en pleine évolution. Utilisant le renouvellement des études de rhétorique et de poétique, elle est aussi à l’écoute des derniers développements des autres sciences humaines, en particulier dans les domaines de la linguistique et de la sémiotique. Du fait de cette pluralité épistémologique, elle suscite chez l’étudiant de nombreuses interrogations sur sa définition et sur sa finalité, sur sa place dans les divers types d’analyses textuelles. Cette Initiation voudrait donner au lecteur les moyens de se repérer dans ces problématiques et de voir que la démarche stylistique est au cœur de l’analyse du littéraire comme phénomène esthétique et social.

    C’est pourquoi, après un bref aperçu historique qui permet d’être à même de comprendre les motivations de la stylistique, le livre aborde les disciplines entrant dans son champ — grammaire, rhétorique, poétique, linguistique, sémiotique — et s’attache à montrer quels éléments de chacune d’entre elles peuvent être mis à son service.

    Puis on expose les postes d’analyse du texte littéraire, véritables points d’accrochage sur lesquels on peut bâtir une investigation stylistique ; la présentation de ces postes d’analyse souligne les liens avec les apports des disciplines envisagées dans la première partie ; elle met en évidence l’importance herméneutique de l’approche stylistique qui procède à une construction interprétative d’autant plus rigoureuse qu’elle s’attache à l’étude du matériau langagier, le sens procédant de la forme.

    Enfin, la dernière partie s’efforce de montrer, concrètement et de manière rapide, comment mettre en œuvre ses connaissances et poser des jalons efficaces pour élaborer un commentaire stylistique.

    Cette nouvelle édition, mise à jour et enrichie, présente notamment les nouvelles perspectives de la stylistique, et une bibliographie renouvelée.

    Claire Stolz est maîtresse de conférences honoraire à Sorbonne Université où elle a enseigné la rhétorique et la stylistique ainsi que la grammaire et l’analyse du discours.

  • Fin des mots, mots de la fin et discours sur la fin. La « fin de vie » en langue(s) et en discours (revue Atlante)

    Date de tombée (deadline) : 15 Juillet 2024

    À : Université de Lille

    Revue AtlanteLien vers l’appel

    Numéro 23, automne 2025

    Fin des mots, mots de la fin & discours sur la fin
    La fin de vie en langue(s) et en discours

    L’appel est également disponible en espagnol, italien et portugais sur le site de la revue Atlante.

    La métaphore biologique ou vitaliste… 

    Penser le fonctionnement et l’évolution des langues en termes de vie et de fin de vie n’est pas un motif nouveau – bien au contraire : la métaphore biologique ou vitaliste, qui consistait à comparer les langues à des organismes vivants, était particulièrement en vogue au XIXe siècle. Ainsi A. Schleicher comparait-il les langues à « des organismes naturels qui, en dehors de la volonté humaine et suivant des lois déterminées, naissent, croissent, se développent, vieillissent et meurent » (1868) ; ainsi A. Darmesteter filait-il la métaphore dans son ouvrage La vie des mots (1887), en étudiant les processus néologiques et de changement de sens comme des formes de naissance, d’évolution et de mort des mots. À la fin du même siècle, cette métaphore a donné lieu à de nombreux débats et critiques (Bréal 1887), dont la virulence pouvait témoigner d’une mutation profonde dans la conception de la langue : elle serait alors passée « du statut d’organisme naturel à celui d’institution » (Auroux 1979) ; une institution sociale comparable à la « monnaie », autre métaphore séculaire revenue en force pour se substituer à la première (Rey 2008). 

    … et ses renouvellements actuels

    La métaphore biologique continue toutefois d’être très utilisée dans les conversations courantes, et a été tout particulièrement visible dans de récents débats autour de certaines innovations lexicales ou morphosyntaxiques populaires et créatives comme l’écriture inclusive. L’Académie française a ainsi déclaré le 26 octobre 2017 que la langue française se trouvait « désormais en péril mortel »[1], tandis que le collectif des linguistes atterrées (2023) voit au contraire dans ces innovations un témoignage de vitalité[2] de la langue française. On pense aussi aux mouvements de revitalisation des langues en danger, qui, résistant à la mort des langues (Hagège 2000), viennent ajouter un nouvel élément à l’opposition classique entre langue vivante et langue morte. Ces problématiques actuelles renouvellent la métaphore biologique de la vie et de la fin de vie en linguistique en la remettant au goût du jour, avec des enjeux politiques et sociaux qui méritent d’être analysés.

    Par ailleurs, d’un point de vue théorique, cette même métaphore est susceptible d’être renouvelée par le récent dialogue établi avec les sciences du vivant par les approches énactivistes ou énactivisantes en linguistique (Bottineau 2017). Paradigme fondé par les biologistes chiliens Maturana et Varela, l’énaction prend sa source dans un questionnement sur la nature du vivant ; ce dernier y est caractérisé par sa capacité à régénérer ses propres composantes, comme l’arbre perd ses feuilles à l’automne pour les régénérer au printemps, ou comme les cellules du corps humain meurent et se régénèrent les unes après les autres. Une langue morte, par opposition à une langue vivante, n’est peut-être pas seulement une langue qui ne « se parle plus », mais aussi et surtout une langue dont les composantes ne se renouvellent plus ; une langue qui ne voit plus certains de ses mots, de ses structures, de ses morphèmes s’éteindre alors que s’en créent de nouveaux au fil des interactions entre les locuteurs. Une langue vivante n’est sans doute en rien comparable à un corps vivant clôturé biologiquement par une membrane ou une peau, avec une naissance et une mort précisément datables ; mais elle se caractérise par une dynamique de renouvellement permanente, au gré des interactions entre des individus multiples. De ces interactions, émerge cet ensemble cohérent et toujours en mouvement qu’est la langue, le système linguistique, dans un fonctionnement probablement comparable à celui de bien d’autres systèmes vivants complexes  – du vol d’étourneaux au banc de poissons, en passant par la fourmilière ou la ruche.

    Étudier l’obsolescence et la fin de vie de certaines composantes d’une langue, s’intéresser aux moments de basculement de certains microsystèmes, permettra d’observer le fonctionnement même de cette dynamique. 

    Fin de vie des signes : fonctionnement du système, fonctionnement des signifiants 

    La question de la fin de vie de certaines formes linguistiques, et d’un renouvellement perpétuel des langues entre néologie et obsologie, avait déjà intéressé J.-C. Chevalier et M.-F. Delport ; sous la plume de cette dernière, on lit par exemple, dans l’introduction du volume La fabrique des mots :

    Ne pourrait-on, au bout du compte, voir l’histoire de la langue comme une néologisation continue et opérant à des vitesses diverses, où la place laissée par l’évanouissement d’un mot (appelons-le « obsologie ») crée un « blanc » dans le système, qui est en soi une néologie ? Quatre cas théoriques se présenteraient : celui d’une néologie à deux faces, le « blanc » et ce qui le remplace ; celui où la néologie consiste en une suppression et une création corrélative ; celui d’une création sans suppression ; celui d’une suppression sans création compensatrice. (M.-F. Delport 2000 : 5-6)

    Ce sont plusieurs questionnements théoriques qui se posent ici. Postuler l’existence d’un « blanc » dans un système, c’est concevoir le système « langue » comme préexistant aux signes qui viendraient le remplir. C’est le concevoir comme un système pré-construit de représentation du monde, commun à toutes les langues, et que chaque langue aurait simplement à instancier par des signifiants qui lui sont propres. Une autre vision des choses est possible si l’on admet que ce sont les réseaux signifiants qui construisent le système ; si l’on admet que ces réseaux signifiants instaurent par eux-mêmes un ordre de représentation qui n’est pas commandé par une structuration préalable du monde et/ou de l’esprit. C’est à quoi invitent de récentes explorations dans le domaine du signifiant[3]. Placer le signifiant « aux commandes » suppose de repenser profondément la notion de système linguistique, et de repenser également son fonctionnement en tant que système complexe tenant du vivant. Doit-on considérer que la fin de vie d’une forme ou de structures grammaticales signifie l’appauvrissement d’un système de représentation préétabli ? Ressent-on la nécessité de remplacer le signe perdu par un autre (avec lequel il serait alors interchangeable d’un certain point de vue) ? Ou bien au contraire, la fin de vie d’une forme est-elle la trace d’un autre ordre qui est en train de se mettre en place, faisant émerger un autre système de représentation ?

    En dernier lieu, si le signifiant est le moteur de la construction du sens, alors, observer la forme même des mots – lire les signifiants – permet peut-être d’accéder à certaines conceptualisations que se donnent les locuteurs : on pourra observer la façon dont les différentes langues disent la fin (fin vs. final en espagnol ; enfin, en fin de compte, au bout du compte, finalement… en français, al fin y al cabo, finalmente, después de todo, a la postre en espagnol, et bien d’autres).


    Objectifs du numéro

    Le présent numéro se propose ainsi de problématiser les applications actuelles de la notion de fin de vie aux systèmes linguistiques, et d’en interroger les enjeux – selon les cas – théoriques et épistémologiques, ou politiques et sociaux.

    Les différentes contributions pourront notamment porter sur les thématiques suivantes (non exhaustives) :

    • Épistémologie et discussions de la métaphore biologique et vitaliste en linguistique ;
    • Analyse de discours : enjeux politiques de la métaphore biologique de la « fin de vie » dans les discours sur la fin de vie des langues, des mots ou les langues en danger ; 
    • Études de cas d’« obsologie » : fin de vie d’une forme, d’un microsystème en diachronie ;
    • Réflexions sur les limites et bornes d’un système d’un point de vue diachronique (permanences, identités et renouvellements d’un « état de langue » à l’autre), voire diatopique (netteté ou porosité des frontières dans le cadre du « contact de langue ») ;
    • Études de sémantique et pragmatique sur le lexique et la phraséologie de la fin dans les langues romanes.

    Informations pratiques

    Contact : marine.poirier@univ-lille.fr 

    • Les propositions d’articles (titre et résumé de 300 mots environ), accompagnés d’une brève notice biographique, seront à envoyer pour le 15 juillet 2024.
    • Les décisions d’acceptation seront communiquées aux auteurs pour le 15 septembre 2024.
    • Après acceptation d’une proposition d’article, les contributions sont à envoyer aux coordinateurs du dossier avant le 15 décembre 2024, délai de rigueur. Les auteurs veilleront à respecter scrupuleusement les normes de présentation disponibles à l’adresse : https://journals.openedition.org/atlante/1302
    • Les articles seront soumis à expertise par le comité scientifique, et le retour d’évaluation aux auteurs est prévu le 15 mars 2025.
    • La version définitive de l’article sera envoyée pour le 15 juin 2025.
    • Publication du numéro : automne 2025.

    Bibliographie indicative

    Auroux Sylvain, 1979, « La querelle des lois phonétiques », Lingvisticae Investigationes, 3/1, p. 1-27.

    Badir Sémir, Polis Stéphane, Provenzano François, 2016, « Actualités du modèle darwinien en linguistique », dans Cl. Blanckaert, J. Léon et D. Samain (éds.), Modélisations et sciences humaines. Figurer, interpréter, simuler, Paris : L’Harmattan, p. 271-288.

    Blestel Élodie & Fortineau-Brémond Chrystelle, 2015, « La linguistique du signifiant : fondements et prolongements », Cahiers de praxématique, 64, en ligne : https://journals.openedition.org/praxematique/3799

    Bottineau Didier, 2017, « Langagement (languaging), langage et énaction, a tale of two schools of scholars : un dialogue entre biologie et linguistique en construction », Signifiances (signifying), 1/1, p. 11-38. 

    Bréal ([1887] 2005), « L’histoire des mots », dans Essai de sémantique, Limoges : Lambert-Lucas.

    Cerquiglini & Pruvost, 2017), Les mots disparus de Pierre Larousse, Paris : Larousse.

    Chevalier Jean-Claude, Launay Michel & Molho Launay, 1984, « La raison du signifiant », Modèles linguistiques, 6/2, p. 27-41.

    Costa James (éd.), 2013, Enjeux sociaux des mouvements de revitalisation linguistique, numéro de la revue Langage & Société, n°145.

    Darmesteter Arsène, 1979 [1887], La vie des mots étudiée dans leurs significations, Paris : Champ Libre. 

    Delport Marie-France, 2000, « Avant-propos », La fabrique des mots : la néologie ibérique, Paris : Sorbonne Université Presses, p. 5-6.

    Dostie Gaetane, Diwersy Sacha & Steuckart Agnès (dir.), 2021, Entre viellissement et innovation : le changement linguistique, numéro 82 de la revue Linx. Revue des linguistes de l’université Paris X Nanterre, en ligne : https://journals.openedition.org/linx/7340

    Duchêne Alexandre & Heller Monica (éd.), 2012, Language in Late Capitalism : Pride and Profit, Routledge.

    García Mouton Pilar & Grijelmo Álex, 2011, Palabras moribundas, Madrid : Taurus. 

    Haboud Bumachar Marleen, 2023, « Desde la documentación activa a la revitalización contextualizada: experiencias con comunidades kichwahablantes en Ecuador », International Journal of the Sociology of Language, 280, p. 91-134.

    Hagège Claude, 2000, Halte à la mort des langues, Paris : Odile Jacob.

    Launay Michel, 2003, « Note sur le dogme de l’arbitraire du signe et ses possibles motivations idéologiques », Mélanges de la Casa de Velázquez, 33-2, p. 275-284, https://journals.openedition.org/mcv/227

    Les linguistes atterrées (collectif), 2023, Le français va très bien, merci, Paris : Gallimard.

    Luhmann Niklas, 2010, Systèmes sociaux : esquisse d’une théorie générale, trad. Lukas Sosoe, Québec : Presses de l’Université Laval.

    Maturana Humberto & Varela Francisco, [1972] 1994, De máquinas y seres vivos. Autopoiesis : la organización de lo vivo, Santiago de Chile, Lumen.

    Maturana Humberto & Varela Francisco, 1999, El árbol del conocimiento, Las bases biológicas del entendimiento humano. Madrid, España debate (3e éd.).

    Maturana Humberto, 1978, “Biology of Language : the Epistemology of Reality”, in George A. Miller and Elizabeth Lenneberg (eds.), Psychology and Biology of Language and Thought: Essays in Honor of Eric Lenneberg, New York, Academic Press, p. 27-63.

    Maturana Humberto, 1988, “Ontology of Observing : the Biological Foundations of Self-Consciousness and of the Physical Domain of Existence”, in Rod Donaldson (ed.), Texts in cybernetic theory : an in-depth exploration of the thought of Humberto Maturana, William T. Powers, and Ernst von Glasersfeld, Felton, American Society for Cybernetics (ASC), p. 1-53.

    Morvan Malo & al. (org), 2023, colloque La métaphore biologique dans les discours sur les langues, Université de Tours, 16-17 novembre 2023.

    Pagès Stéphane (dir.), 2017, Submorphologie et diachronie dans les langues romanes, Aix-en-Provence : Presses Universitaires de Provence.

    Pivot Bernard, 2004, 100 mots à sauver, Paris : Albin Michel.

    Poirier Marine, 2021, La coalescence en espagnol. Vers une linguistique du signifiant énactivisante. Limoges : Lambert-Lucas.

    Raimbault Jean-Claude, 2006, Les disparus du XXe siècle : les 10 000 mots disparus, les 18 000 mots apparus au XXe siècle, Nantes : Éditions du temps.

    Rey Alain, 2008, « Les mots, des immortels ? », préface à Héloïse Neefs, Les disparus du Littré, Paris : Fayard.

    Roussillon René, 2012, « Fonctions des métaphores biologiques », Libres cahiers pour la psychanalyse, 25, p. 59-82.

    Schleicher August, 1868, La théorie de Darwin et la science du langage. De l’importance du langage pour l’histoire naturelle de l’homme (trad. Pommeyrol), Paris : librairie A. Franck. 



    [1] https://www.academie-francaise.fr/actualites/declaration-de-lacademie-francaise-sur-lecriture-dite-inclusive
    [2] https://www.tract-linguistes.org/
    [3] Voir les présentations faites par Blestel & Fortineau-Brémond 2015, Poirier 2021.

  • Les révolutions de la langue – revue Orages. Littérature et culture 1760-1830 n° 24 (2025)

    Les révolutions de la langue
    Revue Orages.
    Littérature et culture 1760-1830 n° 24 (2025)

    Échéance : 15 septembre 2024

    jean-christophe.abramovici@sorbonne-universite.fr
    elise.pavy@u-bordeaux-montaigne.fr

    Revue Orages

    Le tournant des Lumières est puissamment marqué par des révolutions de la langue française. L’idée d’une langue française « régénérée », « révolutionnée » et bien sûr « révolutionnaire » [Bonnet, Roger] hante la seconde moitié et la fin du XVIIIe siècle. Le bilan de ces changements, que beaucoup espèrent définitifs, sera fortement discuté au début du XIXe siècle.
    Après avoir déploré « l’abus des mots » [Ricken, Steuckardt], le mitan du siècle impose la quête de leur « justesse » avec la réflexion sur la synonymie et la néologie [Armogathe, Dougnac, Abramovici]. Les représentations de la langue française dans les textes théoriques et fictionnels, les images et les métaphores qui la décrivent, les systèmes et les règles qui la fabriquent, ainsi que les sentiments diffus et confus qui l’entourent, développent de nouveaux imaginaires. Le mythe du « génie de la langue française » et ses attributs corollaires – clarté, rationalité, sociabilité, fixité et même perfection et universalité [Mornet, Fumaroli, Meschonnic, Siouffi] – sont remis en question et amendés. Entre 1760 et 1830, écrivains et théoriciens mettent d’abord en exergue la perfectibilité de la langue française et son mouvement – fût-il saisi et compris au sein d’une stabilité – ils examinent les malentendus et les méfaits de la communication, la part d’ombre et d’opacité de la langue, voire son fanatisme et sa folie latente. La langue française est bien perçue de façon orageuse, comparée à un fleuve qui s’élargit, profond et impétueux, ou encore à une mer qui oscille, avec sac et ressac, souvent tumultueuse.
    L’idée de ce numéro, les révolutions de la langue française, est d’étudier, du point de vue de l’histoire des idées et de l’histoire de la langue et de la littérature françaises, ce que les écrivaines et les écrivains, les théoriciens de la langue, ainsi que les hommes et les femmes engagés dans et par les mots de la Révolution, nous disent des transformations et des mutations de la langue française. Il s’agira d’analyser comment la langue française se modifie, tant au niveau du vocabulaire que de la grammaire, ou encore de la ponctuation.
    Quelles révolutions de la langue française sont concrètement réalisées ? Comment et par qui sont-elles insufflées ? De quelles manières sont-elles d’emblée jugées et interprétées ?

    Les propositions (5000 signes) sont à envoyer jusqu’au 15/09/2024 à jean-christophe.abramovici@sorbonne-universite.fr et à elise.pavy@u-bordeaux-montaigne.fr. Les articles (30 000 à 35 000 signes, notes et espaces incluses) seront à rendre le 15/03/2025. (Versions définitives après relectures mai 2025, épreuves juillet 2025, parution à l’automne 2025).

  • La langue de Jérôme Ferrari

    27 et 28 mars 2025 à l’Université de Corte (Corse)

    Joseph Dalbera (U. Corte)

    Cécile Narjoux (U. Paris Cité)

    Lien vers l’appel

    La langue de Jérôme Ferrari

    Après les recueils de contributions consacrés à « la langue » de Sylvie Germain (EUD, 2010), à celle de Laurent Mauvignier (EUD, 2012), d’Éric Chevillard (EUD, 2013), de Jean Rouaud (EUD, 2015), de Maylis de Kerangal (EUD, 2017), de Marie Darrieussecq (EUD, 2019), de Léonor de Récondo (EUD, 2021) de Régis Jauffret (EUD, 2023), de Bernard Noël (EUD, 2024), de Marie-Hélène Lafon (à paraître en 2025), nous souhaitons donc poursuivre notre investigation du matériau langagier, dans ses réalisations et ses singularisations littéraires les plus contemporaines, avec l’œuvre de Jérôme Ferrari.

    On ne compte plus, en effet, les prix pour les récits de Jérôme Ferrari, né en 1968, écrivain et philosophe, auteur de recueils de nouvelles – les premières publiées en 2001 aux éditions Albiana, à Ajaccio –, et de huit romans – dont sept, depuis 2007, chez Actes Sud. Parmi eux, Un dieu un animal (2009), reçoit le Prix Landerneau ; Où j’ai laissé mon âme (2010), le Grand Prix Poncetton SGDL et le Prix Roman France Télévisions ; Le Sermon sur la chute de Rome (2012), le Prix Goncourt ; enfin, À son image, en 2018 reçoit le Prix littéraire du Monde. 

    Jérôme Ferrari est aussi l’auteur d’essais, notamment autour de la photographie de guerre : À fendre le cœur le plus dur, paru en 2015 avec Oliver Rohe ; et de chroniques pour le journal La Croix, en 2016, qui ont été rassemblées et publiées sous le titre Il se passe quelque chose chez Flammarion en 2017. Il est également l’auteur de nombreuses traductions en français de l’œuvre corse de Marcu Biancarelli.

    Or, s’agissant de ses romans, la critique littéraire est assez unanime quant à son « style », son « écriture », sa « langue ».  À propos d’À son image, Pierre Assouline dans La République des livres parle d’« une écriture sobre, dépouillée du moindre effet lyrique mais fortement imprégnée de religieux » ; à propos du Principe (2015), il est question d’« une puissante écriture » (Patrick Beaumont, La Gazette Nord-Pas-de-Calais), qui témoigne d’« une grande maîtrise du temps et du récit » (Angélique Moreau, RCF en Berry), où l’écrivain 

    […] développ[e] une écriture toujours plus incantatoire, traversée de raies de lumières et de nébuleuses magnétiques. Particulièrement envoûtantes sont ses phrases de fin de chapitres, déroulées avec une évidence triomphale, comme des conclusions de démonstrations scientifiques, synthétiques et poétiques, ouvertes sur l’infini de la pensée. (Martine Landrot, Télérama)

    Mais c’est principalement Le Sermon sur la chute de Rome qui aura suscité le plus d’éloges quant à son style, sa « langue » :

    « une langue qui ondule comme un long serpent au soleil et que l’éditeur a raison de qualifier de « somptueuse » (Bernard Pivot, Le Journal du Dimanche)

    « une langue virtuose et lyrique » (Baptiste Liger, L’Express)

    « Dans ce roman, voix du ciel et voix du sang se mêlent, donnant à l’écriture ampleur, violence, profondeur et légèreté : une merveille d’équilibre. » (Paulin Césari, Le Figaro Magazine)

    « une langue magnifique qui ne manque pas de grandeur, dans le prologue et le final, et alterne les monologues intérieurs et les dialogues serrés, le cocasse et le tragique, la poésie et le rêve, pour terminer sur le sermon, assumé, sur la chute de Rome » (Sophie Creuz, L’Echo)

    «  son écriture si profonde, proche des émotions, et pourtant pleine de recul ». (Marine Landrot, Télérama)

    « Dans cette fable philosophique, le narrateur prend à son compte les dialogues et les pensées de trois générations de personnages, qu’il pétrit dans une langue superbe pour que lève cette distance nécessaire qui rend les hommes si bouleversants et si pathétiques à la fois. »  (Olivier Maison, Marianne)

    « La phrase se lance, se développe, dévie, s’enroule sur elle-même, repart pour se déployer en beauté. L’art de l’ellipse, la maitrise de l’humour au cœur du désastre, font de ce roman l’un des plus accomplis de la rentrée littéraire ». (Thierry Gandillot, Les Echos)

    « Et ce qui frappe jusqu’au bout, c’est l’incomparable beauté de son écriture, ce phrasé si particulier, imprégné du rythme et de la musicalité des sermons du passé… mais remis au goût du jour. » (Augustin Trapenard, Elle)

    Comment donc caractériser plus précisément, plus rigoureusement le style de l’écrivain, et les procédés à l’œuvre qui font sa langue « superbe », « magnifique » ou « virtuose » ? quel est son rapport à la langue ?  et à la langue corse qu’il traduit ? comment rapporte-t-il les discours autres ?  quelle place accorde-t-il aux figures de style ? Comment décrire sa phrase, son phrasé, son rythme ?  comment travaille-t-il les formes verbales pour (se) jouer du temps ?  Quelles sont aussi bien les « tensions stylistiques » (G. Philippe) qui parcourent son œuvre et la rendent de ce point de vue reconnaissable ?  

    C’est ce que nous tenterons de découvrir lors du colloque organisé les 27 et 28 mars 2025 à l’Université de Corte (Corse), en présence de l’écrivain, afin de décrire, d’analyser, dans une perspective stylistique et linguistique, la langue et le rapport à la langue de cet écrivain « insulaire ». 

    Les actes de la journée seront publiés ultérieurement. 


    Les propositions (un titre et quelques lignes de présentation) de communication et/ ou de contribution écrite devront parvenir avant le 15 octobre 2024 par courrier électronique aux adresses suivantes :

    Joseph Dalbera (U. Corte) (dalbera_j@univ-corse.fr)

    Cécile Narjoux (U. Paris Cité) (cecilenarjoux.univpariscite@gmail.com


    Quelques références bibliographiques

    Sarah Burnautzki et Cornélia Ruhe (dir.), Chutes, ruptures et philosophie : les romans de Jérôme Ferrari, Paris, Classiques Garnier, 2018.

    C. Narjoux, « ‘comme si tous les instants du passé subsistaient simultanément, non dans l’éternité, mais dans une inconcevable permanence du présent’ – Le présent photographique de J. Ferrari dans À son image », dans Études corses, « Littératures en Corse », n° 91, décembre 2024, J. Dalbera & P. Marchetti-Leca (dir.), Albiana/ASCH.

    E. Su, « Quelques aspects de la phrase dans la trilogie de Jérôme Ferrari », dans Études corses,  « Littératures en Corse », J. Dalbera & P. Marchetti-Leca (dir.), Albiana/ASCH, à paraître en décembre 2024.

    Mathilde Zbaeren, Des mondes possibles, des romans de Jérôme Ferrari ; postface de Jérôme Meizoz ; avec une préface de Jérôme Ferrari, Archipel, 2017.

  • Non-dit(s) du genre et de la sexualité dans le roman d’expression française au XIXe siècle (revue Études littéraires)

    Date de tombée (deadline) : 15 Septembre 2024

    À : Université Laval

    Études littéraires

    Études littéraires. « Non-dit(s) du genre et de la sexualité dans le roman d’expression française au XIXe siècle »

    « [S]i le texte classique n’a rien de plus à dire que ce qu’il a dit, du moins tient-il à “laisser entendre” qu’il ne dit pas tout ». Cet aphorisme, extrait du dernier fragment de S/Z (« XCIII. Le texte pensif »), fait du « non-dit » le moteur de Sarrasine ; ainsi, Zambinella n’apparaît castrat qu’à la fin de la nouvelle de Balzac, ouverte à interprétation. « Ce ou cette Zambinella ? » se demande encore Béatrix de Rochefide, au terme du récit : « Et la marquise resta pensive. » Sans réponse, cette « pensée » du genre sexué, qui naît d’une indétermination du genre grammatical, démultiplie le(s) sens du texte / sexe balzacien : or, si l’on postule, comme Barthes, que toute action romanesque est fondée sur un silence – indispensable à l’intrigue –, ne peut-on pas réfléchir aux personnages et à leur(s) sexualité(s) en creux ou en termes de « non-dits » ? C’est re-définir la littérature, et plus particulièrement le roman, comme un instrument de « mise en discours du sexe » (Foucault) et de ses tabous, d’une part ; comme un « jeu » (Ducrot) de sur-signification / silenciation du genre (ou du sujet genré), d’autre part. 

    En 1971, dans La Théorie littéraire, Wellek et Warren écrivaient : « [u]n personnage de roman naît seulement des unités de sens, n’est fait que de phrases prononcées par lui ou sur lui ». Sur le sexe du personnage, en particulier dans le cycle des Rougon-Macquart, Philippe Hamon ajoute : « l’importance du trait sémantique de la sexualité se remarque à la fréquence des actions qui le mettent en scène dans le texte ». Et Fleur Bastin de préciser, à propos de figures féminines comme Clorinde, Sérafine ou Nana : « [l]a narration zolienne doit être pensée comme un faisceau complexe de discours masculins […] la quasi-totalité des personnages de femme[s] sont introduits dans la fiction par le biais d’une perception masculine ». Après nos observations sur Sarrasine, ces trois réflexions, qui peuvent se retourner comme un gant, nous conduisent à trois interrogations majeures : 

    • le personnage de roman n’est-il pas constitué par autant de non-dits (que « de phrases prononcées par lui ou sur lui ») ?
    • sa sexualité n’est-elle pas évoquée par autant de sous-entendus (que « d[’]actions qui l[a] mettent en scène ») ?
    • ce ou ces silences ne sont-ils pas autant de cris pour échapper à l’ordre des sexes (qu’un « faisceau complexe de discours masculins ») ?

    Telles sont les trois grandes questions qui sous-tendent un numéro thématique intitulé Non-dit(s) du genre et de la sexualité dans le roman d’expression française au XIXe siècle.

    Il s’agit de réfléchir à la façon dont le genre (défini « comme principe de différenciation qui détermine la construction des rôles sexués et qui l’organise dans des rapports de pouvoir », Zanone) se construit « entre » les lignes : comment passe-t-il à la fois pour implicite et pour naturel dans les blancs du texte, au point d’apparaître évident aux lecteur·ices – ou à certain·es d’entre eux·elles ? « Ce qui est propre aux sociétés modernes, ce n’est pas qu’elles aient voué le sexe à rester dans l’ombre, c’est qu’elles se soient vouées à en parler toujours, en le faisant valoir comme le secret ». Depuis La Volonté de savoir, on sait combien le « non-dit » (ou l’inter-dit) de la sexualité participe à la production des normes sexuelles, si bien qu’il faut relativiser l’existence de nombreux tabous : « il faut voir qu’un tabou peut en cacher un autre » (Angenot). Au(x) non-dit(s) du genre répond la « vérité du sexe » – ou la (re)naturalisation de la différence et la hiérarchie des sexes – : c’est à ce paradoxe que nous nous intéressons, entendant le « non-dit » comme une « construction culturelle, sociale et idéologique » (Schnyder et Toudoire-Surlapierre) prise dans son acception la plus large : « tout ce que le locuteur aurait voulu dire sans pour autant s’exprimer explicitement par des mots ou par des signes perceptibles et interprétables par son interlocuteur » (Berbinski).

    Méthodologiquement, penser le « non-dit », c’est pencher vers une « linguistique de la connotation » – voire de l’allusion –, chère à Barthes, lecteur de Hjemslev, ou, plus tard, à Catherine Kerbrat-Orecchioni. Quelle est la place du connotant (ce signifiant de « sens second », attaché à chaque acte d’énonciation, comme l’inflexion de la voix, la prosodie de la phrase ou le choix du registre de discours) dans l’expression de l’implicite ? La stylistique et la rhétorique connotative sont deux outils essentiels à l’analyse du « non-dit », qui plus est en littérature. On se souvient des propos de Todorov dans Communication, en 1964 : « [i]l est vrai que la littérature fait un emploi plus fréquent de la connotation que la langue parlée » ; cette particularité se vérifie dans certaines scènes de violences sexistes et sexuelles, signifiées entre les lignes par le recours au langage visuel ou non verbal. « À trois reprises, elle dit non ; mais ses yeux disaient oui, ses yeux de femmes tendre, toute à l’inexorable cruauté de sa passion » lit-on au sujet de Séverine dans La Bête humaine : refusant d’entendre le « non » d’une femme, un homme-interprète substitue un « oui » qu’il prétend lire dans ses yeux. Bien souvent chez Zola, « le corps avouant […] supplée à la révélation verbale « (Ménard). Que les romancier·ères la reprennent à leur compte ou qu’il·elles la subvertissent, cette tension entre la langue et un code imagé / corporel, qui repose sur une interprétation potentiellement abusive d’un implicite supposé, est constitutive de la représentation des violences sexuelles en littérature. Cet exemple suffit à démontrer l’importance du « non-dit » dans la construction de la domination masculine. 

    Le roman d’expression française est un terreau particulièrement fertile à l’étude du(des) non-dit(s) du genre et la sexualité au XIXe siècle. D’une part, après 1800, et plus encore après 1830, le roman acquiert ses lettres de noblesse : José-Luis Diaz a montré comment ce « genre bâtard », exclu de la poétique classique dérivée d’Aristote, s’est racheté aux yeux de la critique romantique. Important « réservoir culturel » – à l’instar du cinéma contemporain, pour reprendre la comparaison de Régine Robin –, le roman du XIXe siècle n’est pas seulement le reflet de la doxa, mais aussi le vecteur de « tout le non-dit, l’impensé, l’informulé, le refoulé […] entraîn[ant] des dérapages, des ratés, des disjonctions, des contradictions, des blancs » ; et parmi ces blancs, les « choses du sexe » se dévoilent plus ou moins implicitement. D’autre part, alors que les écrivain·es sont aux prises, sinon avec la censure, du moins avec l’encadrement administratif qui pèse sur la Librairie, du Premier Empire à la Troisième République (Mollier), la sexualité fait l’objet d’un nouvel arsenal répressif : l’outrage public aux bonnes mœurs (dont on connaît les conséquences pour Flaubert et Baudelaire, en 1857). Pourtant, au moment même où l’on observe la « multiplication des discours sur le sexe », les romancier·ères ne renoncent pas à déchirer le voile : afin d’évoquer la vie sexuelle et affective de leurs personnages en évitant l’opprobre ou des poursuites légales, ils exploitent des outils poétiques dont le « non-dit » fait partie. Ce concept est particulièrement économique : il inclut ce qui doit être tu, en vertu des lois ou des conventions sociales, mais aussi ce qui ne peut être dit, à cause de la langue et de ses lacunes. Puisque le nom prostitué, au sens d’« homme, généralement homosexuel, faisant commerce de son corps » (ou « plus rarement à des femmes », Rey), n’existe pas au XIXe siècle, les écrivain·es ont recours à des néologismes (on pense aux « entretenu[s] » de Balzac ou aux « hommes-courtisanes » de Sue) et à des figures de style (comme la métaphore ou la métonymie) : cette productivité lexicale / stylistique témoigne, dans les pratiques énonciatives extra-littéraires, d’un tabou linguistique de la prostitution masculine, en particulier hétérosexuelle.

    Nous proposons cinq approches (sociocritique, stylistique / rhétorique, narratologique, génétique, en réception) pour aborder les « non-dit(s) » du genre et de la sexualité dans le roman d’expression française au XIXe siècle.

    • Approche sociocritique

    Il s’agit d’étudier la façon dont les auteur·ices non-disent le genre et la sexualité à travers une relecture sociocritique des textes en éclairant « tout ce qui manifeste dans le roman la présence hors du roman d’une société de référence « (ou « ce par quoi le roman s’affirme lui-même comme société »). Dans un article fondateur, en 1971, Duchet avait défini la sociocritique comme « un déchiffrage du non-dit ». En confrontant des œuvres littéraires aux autres écrits de leur temps, qu’ils soient sérieux ou légers, de la médecine à la pornographie, en passant par la presse ou la chanson, on essaiera de retracer la circulation des formulations détournées des tabous sexuels au sein des discours sociaux et leurs actualisations dans la littérature. Si le XIXe siècle fixe a priori un dimorphisme sexuel et fige les rôles de genre (Laqueur), des espaces se forment, d’un texte à l’autre, où la sexualité peut s’exprimer avec une fluidité difficilement dicible ailleurs. 

    • Approche stylistique / rhétorique

    On analysera comment des textes passent le genre « sous silence » en se servant des outils de la stylistique et / ou de la rhétorique. On montrera par quelles figures les auteur·trices trouvent des chemins de traverse pour dire sans dire (ou bien contredire) certains « sexotypes » (Rosier) ou clichés sexués. La « litote », l’« ellipse », la « prétérition », comme l’ont montré Peter Schnyder et Frédérique Toudoire-Surlapierre, ou « les relations de paronymie, synonymie, antonymie, hyperonymie, hyponymie, homonymie et polysémie peuvent être sources d’enrichissements connotatifs, que les deux signifiants correspondants soient co-présents dans l’énoncé (relation in praesentia), ou que l’un sollicite paradigmatiquement l’autre (associations in absentia) » (Orecchioni). La piste ouverte par Berbinski, dans Entre dit et non-dit, pourra également être suivie : « le non-dit est en fait un dit déguisé derrière les divers mécanismes de production ». En évaluant les écarts entre dénotation / connotation dans des textes qui participent à produire les normes sexuelles, on se demandera, d’un point de vue stylistique, comment fonctionne le travail de dissimulation du signe ou de la « marque du genre » (Wittig) au sein des romans étudiés. Les œuvres inspirées des amours de Liane de Pougy et Natalie Clifford-Barney fournissent des exemples de cette « stylisation » (Butler) du tabou, qui permet de raconter des histoires interdites par le biais d’images suggestives. D’autres autrices entendent encore dévoiler crûment ce que leur temps érige en « non-dit », à l’instar d’Odette Dulac, qui, dans Le Silence des femmes (1911), fait retentir des désirs et des colères que le sexe faible est supposé cacher.

    • Approche narratologique

    Pour les romancier·ères, taire le genre peut servir à la construction de tensions narratives articulées autour de la dissimulation du « vrai sexe » de leurs héros·ïnes, sinon de sa négation : c’est le cas pour certain·es membres des Rougon-Macquart, comme Miette, dont les traits féminins ne s’affirment qu’à l’adolescence. Les écrivain·es peuvent cacher ces « secrets », féconds en suspense, à leurs lecteur·ices en les tiraillant entre les points de vue de personnages sachants / ignorants – contradictions que résout le narrateur omniscient à la fin du roman. Ainsi, certains signes du récit n’acquièrent leur signification qu’en conclusion, quand tel actant se révèle être femme, tandis qu’on l’avait cru homme : on pense à Mademoiselle de Maupin de Gautier. Chez André Léo, alias Victoire-Léodile Béra, dans Aline-Ali, le personnage éponyme, au prénom double, fait aussi l’expérience d’une histoire amoureuse sous une identité de genre (dé)jouée. Ce n’est qu’au dénouement de l’intrigue que le signifiant du « non-dit » se remplit et permet aux lecteur·ices la réinterprétation d’indices linguistiques ou physiques a posteriori : ce sont « les hanches conformées comme celles d’une femme » de Lucien de Rubempré, dont le sens ne s’éclaire qu’à la lumière de la relation homoérotique qu’il noue avec Carlos Herrera / Vautrin à la fin d’Illusions perdues

    • Approche génétique

    Le décryptage génétique des « non-dits » du(es) texte(s) est une autre voie possible : les brouillons de certain·es écrivain·es sont-ils plus explicites que leurs œuvres, une fois publiées, à propos des libertés qu’il·elles prennent – ou voudraient prendre – avec les représentations admises du genre et de la sexualité ? Quelles corrections effectuent-il·elles avant la publication de leurs œuvres ? Parmi ces modifications, lesquelles relèvent d’une auto-censure de la part des auteur·ices ou bien d’une intervention extérieure pour masquer leurs témérités (voire, en amont, les astreindre à l’implicitation) ? Les brouillons de Flaubert fournissent un exemple remarquable de ce travail de « gaze » de la sexualité : si ses premiers plans sont d’une crudité étonnante au sujet du désir d’Emma Bovary, Flaubert tâche ensuite, dit-il, « d’être boutonné ». Même constat pour Zola sur Maxime Rougon : Hortense Delair et Michael Rosenfeld ont montré combien l’auteur a cherché à euphémiser l’homosexualité du jeune homme (dont les hanches rappellent celles de Lucien de Rubempré), des dossiers préparatoires à la publication de La Curée. Comment les romancier·ères procèdent-il·elles pour rhabiller les fantasmes et les angoisses qu’ils entendent décrire, puis que reste-t-il d’assez transparent pour provoquer un scandale, voire un procès après la publication de leurs textes en feuilleton ou en volume ?

    • Approche en réception

    Ne pas dire, c’est aussi faire comprendre implicitement : certains outils à l’œuvre dans l’expression du « non-dit » « permettent au locuteur de susciter certaines opinions chez le destinataire sans prendre le risque de les formuler lui-même ; [ils] permettent donc de faire croire sans avoir dit ». Et Ducrot d’ajouter : « Mais on demande souvent à l’implicite de répondre à une exigence beaucoup plus forte. Il ne s’agit pas seulement de faire croire, il s’agit de dire sans avoir dit » – au risque de « banalise[r] toutes les méprises » (Kartsnidou et Litsardaki). Comment fonctionne cette compréhension de l’interdit sexuel, qu’il soit réprimé par l’opinion, la censure ou, plus fondamentalement, l’absence de mots pour l’exprimer ? Quels jeux de connivence sont employés par les écrivain·es pour que leurs lecteur·ices entendent ce que les romans ne veulent, ne peuvent ou ne doivent pas exprimer clairement ? Qu’est-ce qui ne se veut intelligible qu’aux yeux d’un lectorat d’hommes adultes et par quelles allusions ces clins d’œil se fabriquent-ils ? Au contraire, qu’est-ce qui apparaît évident pour les contemporain·es du XIXe siècle et tend à échapper au public actuel ? On ouvrira la réflexion en se demandant comment les textes reposent sur « une part d’indécision qu’il revient au lecteur de lever (ou non) » (Schnyder et Toudoire-Surlapierre).

    Les propositions d’articles, comprenant un résumé d’environ trois cents mots, ainsi qu’une courte bio-bibliographie, doivent être envoyées avant le 15 septembre 2024 à revueel@lit.ulaval.ca et nonditsdugenre@gmail.com.

    Une réponse sera communiquée par le comité éditorial de la revue et les directeur·ices du numéro avant le 30 septembre 2024 (pour une première réception des articles le 15 janvier 2025).

    Bibliographie indicative

    Angenot Marc, « Théorie du discours social. Notions de topographie des discours et de coupures cognitives », COnTEXTES, n°1 (2006), disponible en ligne [https://journals.openedition.org /contextes/51].

    Barthes Roland, S/Z, Paris, Éditions du Seuil, 1970.

    Bastin Fleur, « La femme dans le roman zolien. Idéologies du style », Romantisme, n°161 (2013), p. 101-114.

    Butler Judith, Trouble dans le genre. Le Féminisme et la subversion de l’identité, Paris, La Découverte, 2005. 

    Berbinski Sonia (dir.), Entre Dit et Non-Dit, Éditions Universitaires Européennes, Saarbrücken, 2016.

    Delair Hortense et Rosenfeld Michael, « Caviarder La Curée. Genre et sexualité en jeu dans les réécritures zoliennes », Les Cahiers naturalistes, n°96 (2022), p. 119-133.

    Diaz José-Luis, « Conquêtes du roman (1800-1850) », Romantisme, n°160 (2013), p. 3-10. 

    Duchet Claude, « Pour une socio-critique ou variations sur un incipit », Littérature, n°1 (1971), p. 5-14.

    – , « Une écriture de la socialité », Poétique, n°16 (1973), p. 446-454.

    Ducrot Oswald, Dire et ne pas dire. Principes de sémantiques linguistiques, Paris, Hermann, 1972.

    Foucault Michel, Histoire de la sexualité, Paris, Gallimard, 1976-2018. 

    Hamon Philippe, Le Personnel du roman. Le Système des personnages dans les Rougon-Macquart d’Émile Zola, Genève, Droz, 1983.

    Hjemslev Louis, Essais linguistiques, Paris, Éditions de Minuit, 1971.

    Kartsnidou Chryssi et Litsardaki Maria, « Éditorial. Le non-dit dans la littérature française », Syn-thèses, n°1 (2008), disponible en ligne [https://ejournals.lib.auth.gr/syn-theses/article /view/9282]

    Kerbrat-Orecchioni Catherine, La Connotation, Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 1977. 

    Laqueur Thomas, La Fabrique du sexe. Essai sur le corps et le genre en Occident, Paris, Gallimard, 1992. 

    Ménard Sophie, Émile Zola et les aveux du corps. Les savoirs du roman naturaliste, Paris, Classiques Garnier, 2014. 

    Mollier Yves, « La Censure en France au XIXe siècle », Mélanges de l’école française de Rome, n°121-122 (2009), p. 331-340.

    Rey Alain, Dictionnaire historique de la langue française, Paris, Dictionnaires le Robert, 1992. 

    – , Dictionnaire culturel en langue française, Paris, Dictionnaires le Robert, 2005. 

    Robin Régine, « Pour une sociopoétique de l’imaginaire social », dans Neefs Jacques et Ropars Marie-Claire (dir.), La Politique du texte. Enjeux sociocritiques. Pour Duchet, Lille, Presses Universitaires de Lille, 1992, p. 95-121.

    Rosier Laurence, De l’insulte… aux femmes. Un essai linguistique sur les insultes faites aux femmes, Bruxelles, 180°, 2017. 

    Schnyder Peter et Toudoire-Surlapierre Frédérique (dir.), Ne pas dire. Pour une étude du non-dit dans la littérature et la culture européennes, Paris, Classiques Garnier, 2013. 

    Todorov Tzvetan, « La Description et la signification en littérature », Communication, n°4 (1964), p. 33-39. 

    Wellek René et Warren Austin, La Théorie littéraire, Paris, Éditions du Seuil, 1971. 

    Wittig Monique, “The Mark of Gender”, Feminist Issues, n°5 (1985), p. 3-13.

    Zanone Damien, « Introduction. Questions de genre au XIXe siècle », Romantisme, n°179 (2018), p. 5-11.

  • VocUM 2024 : Langage et (dés)information

    Date limite pour soumettre une proposition :
    31 juillet 2024

    Avis d’acceptation des propositions :
    septembre 2024

    Colloque (en présentiel à l’Université de Montréal) : 14 et 15 novembre 2024

    https://vocum.ca

    Qu’est-ce que [Voc]UM ?

    VocUM, né d’une initiative d’étudiant·e·s de l’Université de Montréal, est l’unique colloque interdisciplinaire et international sur le langage à Montréal. Sa mission est de réunir les jeunes chercheur·euse·s en leur offrant un espace leur permettant de diffuser les résultats de leurs recherches. Il leur est ainsi possible d’une part de développer leurs aptitudes à la communication orale en participant au colloque étudiant annuel, et d’autre part de parfaire leurs capacités de rédaction en publiant des articles dans la revue ScriptUM. Pour ce faire, le langage a été ciblé comme point de convergence pour faciliter le dialogue entre des disciplines autrement isolées les unes des autres.

    Le Colloque, fondé en 2014, en est désormais à sa onzième édition. En plus des conférences présentées par de jeunes chercheur·euse·s et deux plénières, le programme comprendra une séance de présentations par affiches.

    Thème du Colloque

    Le terme ‘information’, du latin formare signifiant « mettre en forme », implique dans son essence le processus de façonner une idée, une représentation, ou bien un concept. Dans l’Antiquité tardive, ce mot acquiert une connotation sociale et interpersonnelle, évoquant le processus de transmission de connaissances ou de vérités, ou même l’acte d’instruire et d’éduquer. Or de la transmission neuronale aux ondes électromagnétiques en passant par les discours politiques et religieux, l’information est partout et change de forme selon les domaines. La 11e édition du colloque VocUM est l’occasion d’interroger les différents visages que l’information et la désinformation prennent, de leur transmission à leur réception et à toutes les étapes intermédiaires. Les médias (nouvelles quotidiennes, bulletins météo) ont développé leur propre langage, et sont le terrain de divers phénomènes de désinformation. Que ce soit les lanceurs d’alertes, le climatoscepticisme, et la diffamation à l’encontre de certaines personnes ou communautés, ces manifestations induisent une érosion de la confiance du public envers les institutions et se traduisent par une nécessité de vérifier les informations qui circulent.

    Alors que le terme ‘information’ remonte à une époque très ancienne, son antonyme s’avère bien plus récent. En effet, le mot ‘désinformation’ a vraisemblablement été emprunté au russe дезинформация (dezinformatsiya) dans le contexte de la Guerre froide pour définir la propagation de fausses nouvelles dans le but d’induire en erreur l’opinion publique. Popularisé dans le domaine anglophone dans les années 1980 et initialement liée aux stratégies de manipulation politique, la désinformation a ensuite été étendue pour inclure toute communication gouvernementale (propagande) contenant intentionnellement des informations fausses et trompeuses. Ainsi, la ‘désinformation’ souligne la propagation délibérée de mensonges et de tromperies dans le but de manipuler les perceptions et les opinions. Notons à cet égard que l’anglais distingue pour sa part la ‘misinformation’’ simplement erronée, de la ‘disinformation’ intentionnellement fallacieuse.

    En cela, les réflexions liées à l’information et à la désinformation touchent un grand nombre de domaines de recherche : en littérature et en traductologie, le genre littéraire (autobiographie, essai, poésie) et le contexte de réception influent sur notre compréhension de l’information. De nombreux écrivain·e·s jouent d’ailleurs à brouiller la frontière entre le réel et la fiction, que l’on pense à l’autofiction – qui joue entre autobiographie et genre romanesque – ou aux écritures d’inspiration documentaire.  Le choix des stratégies de traduction va, par exemple, dépendre de la nature du texte, du public visé, et de la situation historique, culturelle (enjeux des transferts culturels) ou politique (récits nationaux et identitaires) de production et de réception. 

    Un cadre important de propagation de l’information est le milieu académique, où l’intégrité scientifique est au cœur de nombreux enjeux (libre accès, plagiat, usage d’intelligence artificielle, pseudoscientifiques). Les questions de censures intellectuelles (interdiction de livres, inégalité de la répartition des fonds) et de restrictions d’accès à l’éducation (inégalités de genre, de classe) forment également des obstacles au droit à l’information.

    L’intersection du langage et de la (dés)information évoque aussi la question des idées reçues sur les langues et leurs usages. Qu’il s’agisse des perceptions linguistiques, du rapport souvent méconnu entre une langue standard donnée et les diverses formes vernaculaires qui en existent, ou encore de l’impact de cet ensemble de représentations linguistiques sur l’enseignement d’une langue sur son apprentissage : la relation complexe qu’un locutorat entretient avec la réalité de ses pratiques langagières soulèvent d’autres questions relevant de la (dés)information.

    En matière d’accessibilité, l’ère du numérique soulève pour sa part plusieurs enjeux, tout en ouvrant par le fait même de nouveaux horizons. Pensons par exemple aux corpus et archives en tout genre qui sont de plus en plus digitalisés – au coût cependant de l’accès direct à l’information dans sa matérialité. Outre l’aspect juridique de l’accès à l’information, mentionnons entre autres la tendance croissante dans certains pays comme la Suède et l’Allemagne à se prémunir d’une législation obligeant le recours à un langage clair et accessible pour s’adresser au public, afin que les discours politiques officiels ou encore les plaques muséales informatives puissent être compris·e·s par toustes.

    Mais alors que le terme ‘intelligence artificielle’ (IA) est sur toutes les lèvres, les derniers avancements technologiques en la matière apportent leur lot de défis. Les changements fulgurants des progrès en IA générative au cours des dernières années ne cessent de brasser les cartes : vue comme une source d’information par les un·e·s et décriée comme un outil de désinformation par les autres, la question de l’IA ne pouvait être laissée sous silence dans la perspective du thème de cette année.

    Qui est admissible ?

    Les propositions pour VocUM 2024 – Langage et (dés)information pourront entre autres s’inscrire dans les disciplines suivantes :

    Acquisition du langageJournalisme
    Aménagement linguistiqueLinguistique
    Analyse du discours Littérature
    AnthropologieMusicologie
    Communication Neurosciences 
    Didactique des languesOrthophonie
    DroitPhilosophie du langage
    EthnologieSanté publique
    Études classiquesSciences politiques
    EthnolinguistiqueSociolinguistique
    HistoireSociologie
    Histoire de l’artTraduction et traductologie
    Informatique et intelligence artificielleTraitement automatique des langues

    Afin de rejoindre une grande variété de présentateur·trice·s, le colloque VocUM 2024 comportera des séances de communications, d’une durée de 15 à 20 minutes suivies d’une période de questions, ainsi qu’une plage horaire exclusive consacrée aux présentations par affiches. Les étudiant·e·s de tous les cycles sont invité·e·s à soumettre leur projet, en précisant si leur soumission doit être considérée pour une communication ou une affiche (à la discrétion du comité évaluateur), ou seulement pour une affiche.

    Merci de nous faire parvenir vos propositions de communication au plus tard le dimanche 31 juillet 2024 par le biais dece formulaire. Elles doivent être composées d’un maximum de 300 mots et soumises à l’aide du formulaire électronique accessible sur le site Web de VocUM. Le comité scientifique accepte des propositions en français, anglais, espagnol, italien ou allemand. Cependant, la diffusion du savoir en français est fortement encouragée.

    Dates à retenir

    Date limite pour soumettre une proposition : 31 juillet 2024

    Avis d’acceptation des propositions : septembre 2024

    Colloque (en présentiel à l’Université de Montréal) : 14 et 15 novembre 2024

    Pour plus d’informations : http://vocum.ca, info@vocum.ca

    Bibliographie

    Œuvres critiques

    Acke, Daniel. « Révisionnisme et négationnisme » dans Témoigner. Entre histoire et mémoire, vol. 122, 2016, p. 53−63.

    Aristote. Réfutations sophistiques, IVe siècle av. J.-C.

    Bernays, Edward. Propaganda, New York, Horace Liveright, 1928.

    Bourdieu, Pierre. « L’opinion publique n’existe pas » dans Les Temps modernes, n°318, janvier 1973, p. 1292−1309.

    Chomsky, Noam et Robert W. McChesney. Propagande, médias et démocratie [trad. Liria Arcal et Louis de Bellefeuille], Montréal, Écosociété, 2005.

    Colon, David. Propagande. La manipulation de masse dans le monde contemporain, Paris, Flammarion, 2021.

    Decout, Maxime. Pouvoirs de l’imposture, Paris, Minuit, 2018.

    ————. En toute mauvaise foi. Sur un paradoxe littéraire, Paris, Minuit, 2015.

    Halimi, Serge. Les nouveaux chiens de garde, Paris, Liber-Raisons d’agir, 1997.

    Jacquard, Roland. La Guerre du mensonge : histoire secrète de la désinformation, Paris, Plon, 1986

    McWhorther, John. What Language Is: And What It Isn’t and What It Could Be, New York, Gotham Books, 2011. 

    Melançon, Benoît. Le niveau baisse! et autres idées reçues sur la langue, Montréal, Del Busso, 2015.

    Lejeune, Philippe. Le pacte autobiographique, Paris, Seuil, 1975.

    Pratte, André. Les oiseaux de malheur : essai sur les médias d’aujourd’hui, Montréal, VLB éditeur, 2000.

    Ponsonby, Arthur. Falsehood in War-time, Containing an Assortment of Lies Circulated Throughout the Nations During the Great War, London, Garland publishing company, 1928.

    Quivy, Vincent. Incroyables mais faux! Histoires de complots de JFK au COVID-19, Paris, Seuil, 2020.

    Reboul, Anne. « Le paradoxe du mensonge dans la théorie des actes de langage » dans Cahiers de linguistique française, n°13, Université de Genève, Suisse, 1992, p. 125−147.

    Robert, Anne-Cécile. Dernières nouvelles du mensonge, Montréal, Lux Éditeur, 2021.

    Scholar, Richard et Alexis Tadié. Fiction and the Frontiers of Knowledge in Europe 1500−1800, Burlington/London, Aldershot publishing/Routledge,  2016 [2011].

    Schopenhauer, Arthur. Eristische Dialektik, die Kunst Recht zu behalten [L’art d’avoir toujours raison ou La dialectique éristique], 1864.

    Tadié, Alexis. « Fiction et vérité à l’époque moderne », Philosophiques, vol. 40, n°1, printemps 2013, p. 71−85.

    Shultz, Richard H. et Roy Godson. Dezinformatsia: Active Measures in Soviet Strategy, Washington, Pergamon-Brassey’s, 1984.

    Yaguello, Marina. Catalogue des idées reçues sur la langue, Paris, Seuil 1988.

    Œuvres artistiques

    Aristophane. Les nuées, Ve siècle av. J.-C.

    Atwood, Margaret. The Handmaid’s Tale, Toronto, McClelland & Stewart, 1985.

    Beigbeder, Frédéric. 99 Francs, Paris, Grasset & Fasquelle, 2000.

    Bello, Antoine. Les falsificateurs, Paris, Gallimard, 2007.

    Bernard, Olivier. Le Pharmachien [3 volumes], Montréal, Éditions les Malins, 2014.

    Carrère, Emmanuel. L’adversaire, Paris, P.O.L., 2000.

    Collodi, Carlo. Le avventure di Pinocchio. Storia di un burattino [Les Aventures de Pinocchio : histoire d’un pantin], Firenze, Paggi, 1883.

    Dick, Philip K. The Man in the High Castle, New York, G. P. Putnam’s Sons, 1962.

    Gravel, Élise. Alerte : culottes meurtrières! Fausses nouvelles, désinformation et théories du complot, Scholastic Canada, 2023.

    Lindon, Mathieu. Le procès de Jean-Marie Le Pen, Paris, P.O.L., 1998.

    Louatah, Sabri. 404, Paris, Flammarion, 2019.

    Modiano, Patrick. La Place de l’Étoile, Paris, Gallimard, 1968.

    Orwell, George. Nineteen Eighty-Four, London, Secker & Warburg, 1949.

    Platon. Euthydème, IVe siècle av. J.-C.

    Rossini, Gioachino. « La calunnia è un venticello [Air de la calomnie] », Il barbiere di Siviglia [Le Barbier de Séville]  livret de Cesare Sterbini, 1816.

    Volkoff, Vladimir. Le montage, Paris, Julliard, 1982.

  • Le Kaléidostyloscope ou Pourquoi le poulet a-t-il traversé la route ? Pastiches

    L’Harmattan, coll. « Espaces Littéraires« 

    Daniel Bilous

    174 pages
    Prix : 19 €
    Date de publication : 30 Mai 2024

    Lien vers la présentation sur le site de l’éditeur

    Présentation

    Conçue en 1847 aux États-Unis, la devinette est notoire : un poulet est au bord d’une route, qu’il traverse. Pourquoi le poulet a-t-il traversé la route ? Pour aller de l’autre côté !
    La réponse fut un jour assignée à René Descartes, en suscitant d’autres, attribuées à Platon, Aristote, Darwin, Marx, Freud et une foule d’autres penseurs, savants, célébrités, voire personnages fictifs, la supposition d’auteur ajoutant expressément une dimension, l’imitation du style de chacun. Or, sauf pour de brefs mots d’auteurs, peu d’artistes du langage s’étaient vus proposer cette énigme. Pour enrichir les Belles-Lettres d’un chapitre inédit, il fallait donc changer d’échelle, inventer des textes.
    Dans une sorte de kaléidoscope du style, le pasticheur fait ici répondre — quelques lignes, plusieurs pages — cinquante écrivains français (de François Villon à l’Oulipo), deux étrangers et quinze voix non livresques.

    Biographie de l’auteur

    Agrégé de lettres et docteur d’État, professeur des universités à Grenoble et Toulon, Daniel Bilous est spécialiste de l’imitation littéraire, une pratique à laquelle, depuis 1982, il a consacré sa thèse et une soixantaine d’articles. Avec Pascale Hellégouarc’h, il a dirigé le colloque « L’écriture mimétique » (Toulon, 2008). Avant ce livre, il a publié en revues d’autres pastiches (La Bruyère, Mallarmé, Proust, H. de Régnier, Michaux, Rabelais, Heredia).