Étiquette : Littérature

  • La catastrophe en « je ». Violences de masse et pratiques diaristes au XXe siècle

    Du 15 novembre 2023 au 15 mai 2024

    Bâtiment EHESS-Condorcet
    EHESS, 2 cours des humanités 93300 Aubervilliers
    Salle 25-A
    annuel / bimensuel (1re/3e/5e), mercredi 10:30-12:30 / nombre de participant·e·s : 20
    La séance du 15 mai se déroulera de 08 h 30 à 12 h 30, salle 25-A

    https://enseignements.ehess.fr/2023-2024/ue/391

    Intervenantes :

    • Judith Lyon-Caen (référente), directrice d’études, EHESS / Groupe de recherches interdisciplinaires sur l’histoire du littéraire (CRH-GRIHL)
    • Marie Moutier-Bitan, contrat postdoctoral, Claims Conference/Eur’Orbem – Sorbonne Université / Centre d’études des mondes russe, caucasien et centre-européen (CERCEC)
    • Sarah Gruszka, contrat postdoctoral, FMS/Eur’Orbem – Sorbonne Université / Centre d’études des mondes russe, caucasien et centre-européen (CERCEC)

    Introduction

    Ce séminaire d’histoire porte sur les formes du recours à l’écriture à la première personne dans des situations de grande violence historique au XXe siècle : guerres mondiales, génocides, terreur de masse, guerres civiles, pogromes, massacres. Il s’intéresse à l’écriture des populations visées par ces violences, c’est-à-dire au recours à l’écriture comme forme de réponse, de témoignage, de résistance face à la persécution et à la destruction. Le séminaire vise d’abord à établir un inventaire des pratiques, un état des lieux bibliographique et à proposer de premiers outils d’analyse à partir d’études de cas, qui prendront en compte l’extrême variété de ces formes d’écriture. Nous serons particulièrement attentives aux destinées disparates de ces écrits – à leurs « biographies » en quelque sorte –, à la diversité de leurs conditions de transmission et de conservation, à l’histoire éditoriale de certains. En envisageant l’écrit à la première personne non seulement comme une source sur les événements qui l’environnent et qu’il relate, mais comme une forme d’action spécifique dans et face à ces événements, on cherchera à comprendre ce que le recours à l’écriture nous apprend de l’expérience de la violence collective (du déplacement forcé, du camp, du ghetto, de la vie traquée, cachée, de la clandestinité…) ; ce que l’écriture nous apprend de ces expériences – de leurs temporalités, de leurs espaces – quand on observe comment elle advient, comment elle tente de s’y maintenir. On s’intéressera en particulier à des recours brefs, discontinus à l’écriture, de manière à faire entrer dans les corpus de l’écriture personnelle des écrits en général peu considérés du fait de leur inachèvement, de leur maladresse, de leur imperfection formelle.

    Programme

    15 novembre 2023 : Introduction: définitions et approches du journal personnel en temps de catastrophe (Sarah Gruszka et Judith Lyon-Caen)

    29 novembre 2023 : L’écrit personnel comme source documentaire (Sarah Gruszka et Marie Moutier-Bitan)

    6 décembre 2023 : Observer l’écrit: strates d’écriture et « biographies » de textes (séance collective)

    20 décembre 2023 : Les journaux personnels en temps de pogroms et de violence de masse dans la première moitié du XXe siècle (Thomas Chopard et Cécile Rousselet)

    17 janvier 2024 : Les écrits personnels du Rwanda (Rémi Korman)

    31 janvier 2024 : Les journaux de Hiroshima (Inoue Masatoshi)

    7 février 2024 :  Autour du Journal d’Hélène Berr (dialogue avec Mariette Job, éditrice du Journal)

    6 mars 2024 : Destinées I: Edition (Luba Jurgenson et Loïc Marcou)

    20 mars 2024 : Destinées II: Conservation. Étude de cas : le fonds du Mémorial de la Shoah. (Sarah Gruszka, Marie Moutier-Bitan, Karen Taïeb)

    3 avril 2024 : Restitution des travaux collectifs

    15 mai 2024 : Mini journée d’étude conclusive

  • Poétique du naturalisme spiritualiste dans l’œuvre romanesque de Joris-Karl Huysmans, une trilogie de la conversion esthétique

    Poétique du naturalisme spiritualiste dans l’œuvre romanesque de Joris-Karl Huysmans, une trilogie de la conversion esthétique, Alice de Georges, Paris, Hermann éditeurs, coll. « Savoir Lettres », 2022.

    Dans les premières pages de Là-bas, Joris-Karl Huysmans appelle de ses vœux une esthétique romanesque nouvelle qu’il nomme le naturalisme spiritualiste. La tradition critique associe celui-ci à la conversion religieuse du romancier, mais elle s’est plus rarement interrogée sur sa conversion poétique, qui s’effectue dans et par l’écriture. Les configurations narratives, descriptives et stylistiques qui en découlent témoignent de changements formels, afin que s’épousent matière et spiritualité. Cette difficile incorporation prend trois formes.

    L’incarnation de l’esprit travaille la surface sensible en la décomposant ou en la doublant d’une épaisseur nouvelle afin de construire une narration en deux strates. La transsubstantiation, quant à elle, altère les paysages, les personnages ou les objets représentés, absorbant en eux l’érotisme comme le sacré. La transmutation, enfin, par l’art culinaire ou l’alchimie, convertit les matériaux disparates en une substance unique.

    Clef de voûte d’En radeLà-bas et En route, le naturalisme spiritualiste concentre ses effets au cœur de cette trilogie de la conversion esthétique.

    https://www.editions-hermann.fr/livre/poetique-du-naturalisme-spiritualiste-dans-l-oeuvre-romanesque-de-joris-karl-huysmans-alice-de-georges

    Alice de Georges

    Alice De Georges est maître de conférences de littérature française habilitée à diriger les recherches à Université Côte d’Azur. Elle a consacré l’essentiel de ses travaux de recherche au roman du XIXsiècle et aux œuvres de Barbey d’Aurevilly et de Huysmans. Elle a publié Les Illusions de l’écriture ou la crise de la représentation dans l’œuvre romanesque de Jules Barbey d’Aurevilly (Champion) en 2007 et édité La Retraite de M. Bougran de Huysmans (Classiques-Garnier, 2019).

    Compte-rendu

    Compte-rendu publié dans Acta fabula (décembre 2022, vol. 23, n° 10): « La conversion du style de Joris-Karl Huysmans » par Carine Roucan

  • Le Style réactionnaire, de Maurras à Houellebecq

    Le Style réactionnaire, de Maurras à Houellebecq, Vincent Berthelier, Editions Amsterdam, 2022.

    En matière de littérature et de style, dit-on, les conservateurs révolutionnent et les révolutionnaires conservent. Les amis du peuple parlent le français de Richelieu, les amis de l’ordre jargonnent comme des Apaches. L’idée a la peau dure : remontant au moins à Stendhal, il n’est pas rare de la trouver sous la plume des réactionnaires d’aujourd’hui, chez Houellebecq, par exemple, qui fait dire à l’un de ses personnages que tous les grands stylistes sont des réactionnaires. La droite ferait passer le style avant toute chose. À preuve, Céline, dont il serait dès lors possible d’ignorer les idées antisémites et exterminatrices, ou du moins de les dissocier radicalement du style constitutif de sa grandeur.
    Or, Vincent Berthelier le montre, ce discours remplit historiquement une fonction politique. Il se solidifie après-guerre, chez des Hussards soucieux de minimiser l’engagement vichyste ou hitlérien de la droite littéraire et de réhabiliter leurs aînés en les présentant comme des stylistes.
    Plus largement, en étudiant un large corpus d’auteurs de droite et d’extrême droite, ce livre ambitieux voudrait repenser les rapports entre style, langue et politique. Il s’intéresse d’abord à la conception du style et de la langue défendue par certains écrivains, tout en proposant des analyses précises de leur écriture. À chaque étape, il s’agit d’explorer la problématique du style à partir des enjeux idéologiques du moment : dans l’entre-deux-guerres (Maurras, les puristes, Bernanos, Jouhandeau), dans la période de l’essor du fascisme et de la Libération (Aymé, Morand, Chardonne), enfin des années 1970 à nos jours, dans la période où s’élabore une nouvelle pensée réactionnaire (Cioran, Millet, Camus, Houellebecq).

    http://www.editionsamsterdam.fr/le-style-reactionnaire/

    Vincent Berthelier

    Vincent Berthelier est agrégé de lettres et docteur en langue française. Il est membre organisateur du cycle de séminaires « Les Armes de la critique ».

    Compte-rendu

    Compte-rendu de Sandra Poujat : https://www.fabula.org/actualites/109354/v-berthelier-le-style-reactionnaire.html

  • Des femmes et du style. Pour un feminist gaze

    « Des femmes et du style. Pour un “feminist gaze” », d’Azélie Fayolle, Éditions Divergentes, 2023

    Résumé

    Un spectre hante l’histoire de la littérature : des femmes écrivent, et sont (parfois) lues. L’histoire, s’écrivant de mémoire d’hommes, délaisse, néglige et relègue dans l’oubli les productions des femmes. Toujours ramenés au témoignage, si possible doloriste, et critiqués parce que « victimaires », les textes féministes ont pourtant une histoire et, disons-le, du style.

    Cet essai propose, d’un point de vue qui pourrait être celui d’une féministe découvrant le féminisme, un parcours à travers des genres et des œuvres littéraires où se construit quelque chose comme un feminist gaze. Plus engagé que le female gaze, il traduit en registres les émotions d’une vie de femme confrontée à la domination masculine, choisissant en réponse le rire, la révolte et l’utopie – toujours avec style.

    Azélie Fayolle

    AZÉLIE FAYOLLE est chercheuse en littérature, postdoctorante à l’Université Libre de Bruxelles et agrégée de lettres modernes. Sa thèse Ernest Renan : savoirs de la nature et pensée de l’histoire vient d’être publiée (Honoré Champion). Son projet FNRS, « Femmes, nature, discours », est consacré à l’étude des féminismes du XIXe siècle, à l’idée de nature et au statut discursif des textes protéiformes des féministes et, bien sûr, à leur(s) style(s). Elle anime par ailleurs une chaîne Youtube, Un grain de lettres.

  • Mais que reste-t-il de nos métaphores ?

    La métaphore à l’épreuve de la littérature contemporaine

    Directeur de publication : Sylvain Dournel

    Éditions Presses Universitaires de Provence, collection Textuelles

    La métaphore séduit, aimante, fascine. Figure à la fois de la liaison et de la rupture, de l’association comme du transfert, elle est une figure qui va plus loin que la figure. Elle est, par définition et par excellence, « transport », metaphora. La littérature exploite avec avidité ses potentialités, sa force impressive, émotive, esthétique. Si la perméabilisation progressive des grands genres institués, l’émergence de nouveaux – autobiographie, autofiction, nouvelle –, la surexposition médiatique de la chanson – et notamment de la chanson dite « à texte » –, n’ont pas démenti le succès de cette figure-reine, c’est peut-être qu’elle permet également d’exaucer un vœu simple, premier, et définitoire de la création littéraire. Par les reconfigurations qu’elle autorise, la métaphore est une lecture du monde, et par là une modalité d’accès privilégiée à la subjectivité de celui qui l’énonce, à son mode d’appréhension de l’existant, qu’il soit protagoniste, auteur, narrateur ou sujet lyrique. Exposés en surface du discours, la métaphore et ses échos n’affirment ainsi – de manière ostentatoire, presque péremptoire – qu’une seule chose : que le réel peut être envisagé autrement. Il s’agit ici de susciter, à l’aune d’une figure aussi ancienne que la littérature elle-même, une épistémologie de celle de ce siècle, d’en dresser un état des lieux afin d’évaluer ce que la métaphore « fait » à la littérature, et ce qu’en retour la littérature « fait » à – et de – la métaphore.

    ISBN : 9791032003763

    Nombre de pages : 292